Membre originel du mouvement Arte Povera, Piero Gilardi, 68 ans, est un artiste engagé de la scène artistique internationale. Pendant les années 60, il fut l’un des principaux contributeurs de cet « art pauvre » n’utilisant que des matériaux sans valeur. A Tours, au CCC (Centre de création contemporaine), l’artiste turinois propose de revisiter près de 50 ans de création sous le titre Leçon de choses. Une rétrospective complète qui retrace son engagement pour un art « habitable » qui préconise une interaction permanente entre l’individu et l’environnement. « Je travaille sur le rapport entre l’art et la vie. Notre courant ne produit pas d’icones mais des expériences sensorielles, relationnelles et micro-émotionnelles », explique l’artiste qui a développé des recherches approfondies dans les domaines du Bio Art et des nouvelles technologies dès les années 1980. Parmi les œuvres les plus récentes – mêlant justement ces deux disciplines – : des fragments de nature ou d’objets quotidiens recréés en mousse de polyuréthane interpellent le visiteur. « Les années 60 ont fait triompher l’art chimique et les matières plastiques. On a créé une quantité inouïe de produits mais aussi généré une énorme pollution », regrette-t-il. Et de citer l’œuvre du cinéaste Stanley Kubrick, « Orange mécanique qui parle très bien de cette pression de l’industrialisme subie par nos sociétés. »
Chez Gilardi, la thématique écologique ne répond pas à une logique commerciale opportuniste. Son engagement est enraciné. Au point de parler « de solidarité biologique », avec l’espèce animale. Une installation (en mousse) représentant un squelette d’un poisson fossile – « lequel représente un anneau de conjonction entre les animaux marins et terrestres » –, découvert par un paléontologue, lui permet de développer « un discours métaphorique ». Dans sa conception de la vie, l’homme n’est pas seul. « Je suis contre l’anthropocentrisme, ma vision est élargie et horizontale. L’attention portée aux animaux n’est pas assez approfondie dans nos sociétés. Cela reflète aussi, indirectement, notre conception du rapport social. » A travers ce travail fait de rencontres inattendues et – parfois – déroutantes, c’est finalement le « mystère de la vie » que Gilardi cherche à percer. Une ambition inépuisable qui assure la pérennité de ce courant minoritaire et injustement négligé.