Microperformativité : les nouveaux acteurs de l’art  

Déplacement radical d’un point de vue anthropocentré, par la notion d’échelle et de temps, la microperformativité résonne tel un néologisme à la croisée des arts média et de la performance. Convoquant la philosophie et des pratiques artistiques affranchies du marché, elle repose sur une posture scientifique empirique, que Jens Hauser, curateur de deux jours de débats et d’ateliers, d’observations sensibles et de questionnements – les jeudi 13 et mercredi 14 avril prochains – fomente depuis le début des années 1990, avec quelques artistes, chercheurs, performeurs et théoriciens ici réunis. Le symposium « De la performance à la microperformativité », étayé par la publication de la revue On microperformativity Performance research 25.3, est une première en France qui se déploiera au Générateur à Gentilly ainsi qu’à l’Ecole polytechnique en collaboration avec la Chaire Arts & Science  où chacun peut prendre part aux expérimentations dès jeudi 13 avril de 9h30 à 17h30, sur inscription.

Il sera question au cours de ces deux jours, de Bain brisé, d’Homme-et-femme-sur-puce, de Zoïmorphisme, de Rêve quantique, de microbiome, de Pollen et du sens où tourne la ronde, d’une route microexplosiveEt même, d’une solution au problème de la raréfaction du temps. Mais qui performe quoi au juste ? Chris Salter, artiste et professeur d’arts immersifs prônant l’interdisciplinarité depuis des années, directeur de l’Immersive Arts Space à l’Université des arts de Zurich (ZHdK), a sa petite idée sur la question : « Les bactéries performent des processus. Les scientifiques performent des expériences. Les algorithmes performent des actions. Les humains performent le genre et le sexe. La question est de savoir qui ou quoi ne performe pas de nos jours ? »

Une partie de l’histoire de l’art est en train de se jouer  ici, cartes sur table au moment même où le concept de symbiose s’impose dans tous les appels à projets de L’ISEA (International Symposium of Electronic Arts) dont les monstrations prendront place en mai, dans plus de 170 centres d’art en région parisienne ; alors même que par-delà les collines de Romainville, La Fondation Fiminco est prise comme terrain d’expérimentation par le Centre Wallonie Bruxelles avec son « Symbiosium »  en expansion jusqu’au 6 mai 2023. Il est temps de se mettre à la page !

Jens Hauser, théoricien-chercheur, spécialiste des relations entre arts et (bio)technologies, cycliste tout terrain et danseur entre disciplines  nous propose d’ores et déjà quelques pistes de réflexion : « À une époque où l’art de la performance – celle qui concerne principalement le corps humain – évolue vers une performativité en art généralisée, les artistes redéfinissent ce qui est considéré comme un corps aujourd’hui, en déplaçant l’attention des actions mésoscopiques, dit-il, vers les fonctions microscopiques, des gestes physiques aux processus physiologiques, ainsi que du temps diégétique mis en scène (le temps du théâtre) vers le vrai temps performatif d’une expérience. »

©Jens Hauser & Lucie Strecker : « On Microperformativity » Performance Research 25.3 – couverture de la publication ©DR

Mais quel est l’effet produit, voire recherché par ce déplacement d’échelle spatiale et temporelle ? « De telles pratiques artistiques inspirées par les techno-sciences cherchent à stimuler une prise de conscience allant de l’invisibilité du microscopique à l’incompréhensible complexité du macroscopique, en proposant des œuvres d’art procédurales en compression mésoscopique qui exigent, une remise en question de nos habitudes perceptives, humaines-trop-humaines », explique le co-commissaire  du programme de conférences  et d’exposition OU \ / VERT au centre d’art Transpalette de Bourges que nous avions rencontré quelques années plus tôt. Autrement dit : « Des fragments de gènes, des cellules, protéines, enzymes, bactéries ou virus jouent un rôle de proxy, alors que la sociologie des sciences analyse les systèmes expérimentaux, tout en mettant en question l’échelle de l’action humaine comme unique point de référence », précise-t-il.

Entrer en matière : l’agentivité à l’œuvre

Pour l’artiste et chercheuse Dominique Peysson,  autrice du passionnant ouvrage L’image-matière — Matériaux émergents et métamorphoses imaginaires (édition Dis Voir, 2016)la microperformativité consiste notamment à questionner ce qui différencie la matière inerte de la matière vivante à l’échelle moléculaire : « Ne passe-t-on pas plutôt de manière continue de l’« infra-vie » au vivant ? Il est temps de faire table rase de cet engouement pour l’ordonnancement qui nous vient du 19e siècle, et qui nous a conduit à classer toute entité vivante de manière figée et rigide », explique-t-elle. Renoncer – comme le préconise Thomas Teams– à définir ce qu’est ou n’est pas le vivant, c’est ouvrir les yeux sur cet incroyable bestiaire que sont les « infravies » qui défient toutes nos anciennes définitions – des entités, dont les virus font partie, de nature intrinsèquement dynamique et sur lesquelles repose l’existence du monde vivant, et ses échanges permanents avec le reste de l’univers. « L’art peut sans doute nous aider à créer cette place qui manque dans notre imaginaire, resté bien trop profondément encore de nature anthropomorphique, en réinterrogeant le regard éthique que nous posons sur ces pratiques, ces vivants et leurs hybridations », affirme l’artiste plasticienne et chercheuse scientifique.

Dominique Peysson, L’image-matière — Matériaux émergents et métamorphoses imaginaires  © Dominique Peysson

Zoomer sur l’objet du regard tout en inversant le point de vue afin de revaloriser la teneur des échanges ! 

Pour l’artiste Irini Athanassakis qui opère avec le biologiste David Berry, il s’agit  d’attirer  notre attention sur la trace microbienne, le résidu persistant de cellules que nous transférons sur les objets, les pièces et les personnes que nous rencontrons : avec Becoming Symbionts une de leurs actions performées, ils nous proposent de reconsidérer  l’importance cruciale de la flore microbienne maternelle pour le développement de sa progéniture, autrement dit de revaloriser le lait maternel et ses composants microbiens comme des actifs et même des « devises »  primordiaux que sont le sperme, le sang, l’eau et l’oxygène. Becoming Symbionts est une mise en exergue de recherches scientifiques récentes qui corroborent l’existence d’une interaction intime invisible entre les mères et leurs bébés via le transfert de lait maternel et de microbes, augmentant la valeur de « la  monnaie »  à chaque échange. A nous alors de jouer un rôle performatif et procréatif dans l’élargissement de notre perception.

L’écologie de la relation 

Le concept de microperformativité est né dans le giron d’un art expérimental post-numérique, dans lequel ce que l’on nomme désormais les micro-agentivités biologiques ou technologiques deviennent « des protagonistes performatifs centraux, qu’il s’agisse de cellules, de molécules, de bactéries, de virus, de phénomènes physico-chimiques, de plantes, de machines ou encore de systèmes hybrides expérimentaux, encadrés par des contextes écologiques-technologiques plus vastes », entérine la nouvelle « bible » publiée  par Bernard Andrieu et Gilles Boëtsch, Les mots de demain : Un dictionnaire des combats d’aujourd’hui, aux éditions Atlande (octobre 2023). L’ouvrage collectif fait notamment référence aux termes « d’agentivité » et de « performativité posthumaniste », énoncés par la théoricienne des sciences féministe Karen Barad en 2003, postulant qu’aujourd’hui « l’agentivité est libérée de son orbite humaniste traditionnelle », et proposant une « approche matérialiste, posthumaniste de la performativité qui remet en question le positionnement de la matérialité en tant que donnée ou simple effet de l’agentivité humaine » (Barad, 2003). Ces organismes non humains mis en scène en relation avec des systèmes techno-scientifiques ou algorithmiques performatifs, abordent ainsi les dynamiques contemporaines reliant l’organique et le machinique… voire les questions d’hybridation quand de nouvelles cartes corsent encore le jeu !

Hybridation microbiotique 

Certains d’entre vous se souviennent sans doute d’un geste artistique historique qui (fomenté depuis 2004)  suscita l’émoi  en 2011,- Que le cheval vive en moi !– lorsque Marion Laval-Jeantet, déplaçant le concept de performance à une échelle moléculaire invisible, se fit injecter du sang de cheval « compatibilisé » dans les veines. Depuis le début des années 1990, le duo Art Orienté Objet, que forment Marion Laval-Jeantet et Benoit Mangin, développe des pratiques artistiques performatives qui engagent des questions politiques et environnementales, impliquant de plus en plus l’auto-expérimentation biomédicale d’un coté, ainsi qu’un travail sur le microbiote animal, de l’autre, comme nouveaux milieux dans et avec lesquels performer. 

Que le cheval vive en moi ! – 2011 – Marion Laval-Jeantet  © Art Orienté Objet, Marion Laval-Jeantet et Benoit Mangin © montage DR

Lors du Symposium « On microperformativity » qui se tiendra le vendredi 14 avril à partir de 13h au Générateur, Marion-Laval Jeantet prendra la parole afin d’évoquer deux récentes expériences artistiques impliquant « les microbes comme acteurs » ou plutôt « les microbiomes comme lieux de performativité» précise Hauser. Tandis qu’Holy Coli, la souris en odeur de sainteté a pour objet d’hybrider le microbiote d’une souris avec de l’Escherichia Coli génétiquement modifiée conférant aux excréments du rongeur des odeurs proches du parfum des violettes, une autre expérimentation May the Rain Forest Live in Me (ou May the Pygmy Live in Me) consiste à greffer le microbiome d’un Pygmée – son écosystème interne – sur le corps de l’artiste. Une manière engagée et radicale, « d’interroger la destruction aveugle causée par la société technologique au nom du développement, et les conséquences complexes de la mondialisation sur nos systèmes biologiques », soulignent les artistes. Outre le caractère politique, voire sociologique, de ces deux expériences artistiques qui n’engagent pas de la même façon le corps de l’artiste dans le sens où l’on perçoit généralement le terme de performance,  il s’en dégage pourtant, un point de vue, une esthétique similaire, « qui nous plonge dans un univers de science-fiction, où l’imagination va au-delà de la confiance visible et de la spectacularisation expérimentable », commente le commissaire.

Un autre artiste invité Paul Vanouse questionne, lui aussi, la signature olfactive du corps mais cette fois « humain », dans une performance qu’il titre Labor : Le corps post-anthropocentrique « au travail » : Quid de nos odeurs corporelles ? Elles disent tant de choses de nos humeurs de nos peurs, quelques soient nos intentions ou nos actions apparentes. Le microbiote, les microbes qui vivent sur ou dans nos tissus et fluides, ces agents qui agissent tels des « micro-performers » sur l’épiderme de l’être humain est au cœur de l’œuvre de Vanouse : Labor est une installation artistique dynamique et multi-sensorielle qui tente de recréer l’odeur de l’effort humain, bien qu’aucune personne ne soit impliquée dans la création de cette odeur – elle est créée par des bactéries qui se propagent dans les trois grands bioréacteurs du dispositif artistique. Chaque bioréacteur incube une espèce de bactérie de la peau humaine responsable de l’odeur primaire des corps en sueur. La sueur humaine, est en soi inodore, ce sont ces bactéries qui se nourrissent des composants de « notre » sueur pour créer à leur tour, les composants chimiques volatils et odorants que « nous » associons à la sueur et à l’effort physique. « La biosémiotique, aussi appelée la sémiotique du vivant, est une branche de la biologie et de la sémiotique qui étudie tous les aspects des signes biologiques – le processus de signification, c’est-à-dire la production, la codification et la communication de signes », précise l’outil Wikipedia. L’olfaction fait bel et bien partie de ces signes invisibles qui contribuent à l’esthétique de la « microperformance » : à débattre lors du symposium !  Pour Hauser, dont les recherches et collaborations ont contribué à enrichir Le dictionnaire des combats d’aujourd’hui par des définitions (ré)affûtées à chaque intervention autour du globe, la question des esthétiques produites par la microperformativité est centrale : comment les activités inconscientes et incontrôlées du corps humain vivant font-elles surface ? « Des micro-gestes et techniques somatiques dans des performances apparemment immobiles mettent notamment en évidence le système végétatif, qui régule les fonctions vitales comme l’activité métabolique, la respiration et le rythme cardiaque, au-delà des catégories telles que l’intentionnalité et la subjectivité, traditionnellement considérées comme centrales dans l’action humaine »  écrit-il.

Yann Marussich, Bain Brisé © photo : Sarah Maitrot

Pour une esthétique emersive

La performance « immobile » de Yann Marussich nous propose vendredi soir à 20h d’observer ces affleurements du corps : plongé nu dans un bain de verre, l’artiste mettra en scène avec Bain Brisé, des micro-mouvements et des flux physiologiques à peine perceptibles, offrant un espace de projection d’où émerge le travail interne du corps, élargissant les paramètres perceptifs habituels en sensibilisant à la fois le performeur et le public aux micro-phénomènes spatiaux et aux macro-phénomènes temporels. Le philosophe du corps, Bernard Andrieu, convié au symposium, nous invitera dans l’après-midi même à débattre du potentiel épistémologique et de la forme esthétique produite par cet art de la performance qu’il qualifie d’émersif. « Et qui plus que sur les mouvements physiques, se focalise sur des phénomènes physiologiques micro-performatifs, tels que la douleur, la respiration, le flux sanguin ou la posture du corps ; l’émersion étant un mouvement au cours duquel des formes apparaissent aux spectateurs à la surface du corps, et qui extériorisent les sensations internes de l’artiste. » Encore faut-il que le corps soit maintenu dans des dispositifs pour le moins contraignants ! Décidément la microperformativité s’apparente à un art plus proche ici du stoïcisme que de l’épicurisme –  le préfixe « micro » qui caractérise cette forme artistique participative ne minimisant en rien la prise de risque ni l’engagement de l’artiste.

Rêve quantique – le jour où j’ai imaginé l’océan © Virgile Novarina, Walid Breidi, et LABOFACTORY (Laurent Karst et Jean-Marc Chomaz).
L’équipe de Rêve quantique – le jour où j’ai imaginé l’océan. De gauche à droite : Walid Breidi, Virgile Novarina, Laurent Karst et Jean-Marc Chomaz.© photo :  Didier Bouchon.

Ouf ! Non seulement Virgile Novarina ne risque pas sa peau mais il n’hésite pas à faire des siestes en public. Il est auteur-réalisateur de films sur la performance (édités sur DVD chez Après éditions) et investi dans le champ des relations art-science ; artiste-chercheur sur le sommeil il se met lui-même en scène dans des performances depuis 2006 ! Rêve quantique, le jour où j’ai imaginé l’océan est une installation qu’il accomplit avec Walid Breidi et LABOFACTORY (Jean-Marc Chomaz, Laurent Karst) : « Lorsque nous dormons, notre cerveau traverse différents états créatifs, nous voyons des formes et des couleurs dans l’obscurité et nous entendons des sons dans le silence. Il y a donc un véritable fossé entre l’apparence inerte d’un dormeur et la richesse de son expérience intérieure », pose-t-il comme postulat, dont l’installation Rêve quantique propose au visiteur une relecture sensorielle et poétique du paradoxe. Dans la pénombre, un dormeur muni de capteurs semble interagir avec un mystérieux objet, une cuve transparente circulaire contenant un océan miniature, inerte en apparence — de l’eau dormante —, mais dont les mouvements intérieurs sont révélés au sol par un jeu d’ombre et de lumière. Volutes, courants, vagues, et tourbillons, invisibles à l’œil nu, apparaissent au sol, traduisant en temps réel l’activité invisible du cerveau « endormi ».

© Vincent Martial et Gwendoline Robin, micro explosive road DR

Dès jeudi soir (la veille de sa performance au Générateur) assis cette fois-ci à la table du curateur, Virgile Novarina participera à une table ronde au côté de Vincent Martial – activateur avec sa comparse, l’artiste performeuse belge Gwendoline Robin, de glace carbonique, de bougies et autres matières « soniques » sensibles (micro explosive road), dans un hommage s’il en est, mais peut-être pas, aux réactions savamment orchestrées de Peter Fischli et David Weiss en 1987 (Der Lauf der Dinge). Ainsi va le cours des choses – qui parfois s’enchaînent ou bien déplacent ici nos perceptions.

« Cet événement veut faciliter une réflexion sur les nouveaux espaces de performance et possibilités d’action que permettent les avancées scientifiques et technologiques actuelles, comme la construction d’une pensée non anthropocentrique, en lien avec les pratiques performatives contemporaines », propose Jens Hauser, récemment invité par Lucie Strecker, curatrice à Vienne, de l’exposition Holobiont. Life is Other!* avec laquelle il co-signe une publication« Le concept de microperformativité interroge en outre, le monde microscopique et ses agents biologiques et technologiques en tant que nouveaux acteurs de l’art, en reposant les questions : Qui habite le monde ? Et qui agit pour qui ? »

 * Le concept de microperformativité a été au cœur de l’exposition Holobiont. Life is Other !, récemment organisée à l’Angewandte Interdisciplinary Lab de l’Universität für angewandte Kunst de Vienne et dont la curatrice était Lucie Strecker. Introduite en 1991 par la biologiste Lynn Margulis, l’idée de l’holobiont décrit l’humain comme un être vivant totalement imprégné par la biosphère, colonisé par des bactéries, des champignons et des virus.

Informations complémentaires>

De la performance à la microperformativité : une proposition curatoriale de Jens Hauser, les 13 et 14 avril 2023. Performances, mises-en-scène, symposium, ateliers pratiques et théoriques et présentation de la publication On Microperformativity. Performance Research 25.3 de Jens Hauser & Lucie Strecker

Propositions artistiques de Yann Marussich, Gwendoline Robin & Vincent Martial, Virgile Novarina, Walid Breidi et LABOFACTORY.

Contributions de Lucie Strecker, Paul Vanouse, Marion Laval-Jeantet, Mariana Pérez Bobadilla, Irini Athanassakis, Bernard Andrieu, Chris Salter, Dominique Peysson.

Ateliers art-science avec Antoine Desjardins, Giancarlo Rizza, Jean-Marc Chomaz, Pierre Bourdon, Karine Bonneval, Marco Suárez–Cifuentes.

Démonstrations et ateliers participatifs : jeudi 14 avril : 9h30 à 17h30 CNRS-École Polytechnique, Laboratoire d’Hydrodynamique (LadHyX), 91128 Palaiseau. Nombre de participants limité à 20 personnes, pour les ateliers :  inscription par courriel : mentionnez votre nom, profession/affiliation, et 1-2 phrase/s sur votre motivation. maxime.lafforgue@legenerateur.com 

Le Générateur 16 rue Charles Frérot, 94250 Gentilly
01 49 86 99 14, à 100m de Paris 13ème. Tout le programme est ici Microperformativity

Visuel d’ouverture>  Yann Marussich, Bain Brisé  © photo : Sarah Maitrot

Auteurs : Véronique Godé avec Jens Hauser