Le don de Vera Molnàr à la bibliothèque de l’INHA

Vera Molnàr, 3 triades 3 couleurs, 1995, série de 6 estampes, 50 × 50 cm, no3 ∕ 4. ©Vera Molnàr ⁄ Paris, bibliothèque de l’INHA, EM MOLNAR 101, 102, 103, 104, 105 et 106

L’artiste Vera Molnàr vient de donner à la bibliothèque de l’Institut national d’histoire de l’art (INHA) 272 estampes, 2 portfolios et 12 maquettes préparatoires. Ce don constitue un corpus exceptionnel, représentatif de l’ensemble de l’œuvre de l’artiste, unique dans les collections publiques françaises et étrangères.

Vera Molnàr est née en 1924 à Budapest où elle a suivi l’enseignement classique à l’école des Beaux-Arts dont elle sort diplômée, professeur d’histoire de l’art et d’esthétique en 1947. Cette même année, elle quitte la Hongrie et s’installe à Paris où elle vit et travaille toujours aujourd’hui.

Choisissant l’abstraction géométrique comme famille picturale, elle est durant les années 1950 une constructiviste radicale qui refuse de qualifier d’art ce qu’elle considère avec l’appui théorique de son mari François Molnàr, scientifique, psycho-physiologiste, comme des expérimentations. Dans cet esprit, elle invente dès 1959 une « machine imaginaire », procédé conceptuel proto-informatique qui consiste à établir des instructions de composition strictes qui sont suivies d’une réalisation systématique, à la manière d’une machine. Elle franchit un nouveau pas, en 1968, en utilisant un ordinateur pour l’aider à concevoir des œuvres, issues de programmes, d’algorithmes qu’elle apprend à maîtriser faisant d’elle l’artiste pionnière en France du dessin génératif.

Curieuse de tous les matériaux et de tous les supports, elle dessine, colle, peint, conçoit des sculptures, programme, photographie, réalise des installations, des livres d’artiste (les livrimages) et un formidable Journal intime (1976-2020) d’ordre plastique en 22 volumes de presque 5000 pages. Dès qu’elle le peut, elle s’adonne à l’estampe. Initiée aux beaux-arts, elle sait très jeune comment graver sur bois ou sur linoléum. Mais parce qu’utiliser sa baignoire n’est pas sans poser quelques problèmes domestiques, elle fait appel à des professionnels pour un grand nombre d’éditions. En 2022, elle décide de réunir un corpus important pour en faire don à la bibliothèque de l’INHA.

Représentatives de l’œuvre de l’artiste, ces estampes appartiennent à des familles formelles travaillées, reprises, réinvesties durant plusieurs dizaines d’années. Parmi celles-ci, Les Hypertransformations, hommage à Klimt (1974), 14×14 carrés gris sfumato fond noir (1979), 4 carrés rouges, Brèches (1989-1999), 3 triades 3 couleurs (1995), Ordinateur miroir de la main (1982). Découpé, décalé, chevauché, abouché, poussé, recouvert, faisant naître de son déplacement d’autres formes, incises, triangles, quadrangles, le carré, les carrés se déboîtent, esquissent une figure d’équilibre ou génèrent une indécision perceptive… à chacun de décider.

Le don de Vera Molnàr vient enrichir les collections de la bibliothèque de l’INHA dont la politique d’acquisition s’est développée ces dernières années avec notamment les dons d’œuvres de Terry Haass en 2016, d’Ellsworth Kelly en 2018, de Takesada Matsutani en 2020 et l’acquisition des estampes de Thomas Schütte en 2021.

Contact> Site de l’artiste : www.veramolnar.com