Sous ce titre, nous vous proposons une série d’articles que vous pourrez retrouver chaque mardi. Notre objectif est de présenter cet art « nouveau », de le situer dans une continuité historique, d’en analyser le contexte technologique et juridique, d’en découvrir les multiples facettes et d’imaginer ses développements futurs. Prélude.
Oslo, 2004. Le soleil n’est pas encore levé que déjà des silhouettes se pressent vers l’entrée du métro. Rien ne devrait distinguer ce matin-là d’un autre ; pourtant, la traversée habituelle du long couloir qui mène au quai se transforme en une surprenante découverte pour de nombreux lève-tôt. Sur 20 mètres, un jardin extraordinaire se développe au rythme des passants. Plus question de garder la tête baissée, ni de s’échapper par la pensée, le moment d’étonnement dissipé, chacun comprend qu’il est l’acteur d’une expérience inédite. Les fleurs s’épanouissent, meurent et renaissent en un cycle perpétuel et toujours original. Les Osloïtes se laissent conquérir par Ultra-nature, une œuvre interactive et générative de Miguel Chevalier. Utiliser le terme « art numérique » n’est qu’une facilité d’écriture. Cet art qui se déploie maintenant depuis plusieurs décennies est tellement protéiforme que le confort de la simplicité pour une meilleure compréhension frise toujours l’insoutenable simplification. C’est pourquoi, il paraît plus juste d’intituler cette série d’articles : « Le numérique, une nouvelle économie pour l’art » plutôt que « L’art numérique a-t-il un avenir économique ? » Quoi qu’il en soit, les deux figures de style appellent de nécessaires précisions et développements. Impossible, il est vrai, de ne pas revenir en arrière pour relater la naissance de cet art « nouveau », qui s’est tant et si bien détaché de sa matrice technologique qu’aujourd’hui le milieu de l’art ne peut plus l’ignorer. Porté par son caractère numérique, il se crée, se transforme, se multiplie, se diffuse, se transmet, se vend… sans besoin d’intermédiaire. Une révolution dans l’histoire de l’art et du marché. Issu de la science, il continue de s’en nourrir pour inventer de nouvelles formes. Toujours à la recherche d’opportunités, les professionnels de l’art se demandent s’il est suffisamment « prometteur » pour qu’on l’introduise dans les galeries, les salles de ventes ou les collections. Dans le même temps, les artistes cherchent des débouchés économiques qui leur permettront de poursuivre leurs recherches. De leur côté, les décideurs désirent mieux cerner les potentialités d’un art qui utilise une technologie dont on dit qu’elle marquera notre siècle et qui d’ores et déjà questionne tous les pans de l’économie mais aussi le droit et révolutionne les usages. Parler avec les professionnels, observer des expériences, comme celle du cinéma numérique, dénombrer les multiples initiatives de certains acteurs du secteur, confronter la puissance créative vertigineuse de l’ordinateur et, en connivence improbable, celle du génie humain, ne peut, à défaut de s’interroger sur l’âme du sujet, que convaincre ceux qui croient en tous les avenirs de cet art : du zéro à l’infini !
Mardi prochain : « L’art numérique dans l’histoire de l’art : un enfant légitime ».