Séverine Hubard | Regardum

La première chose qui intéresse Séverine Hubard, lors des visites de repérages dans l’ancienne usine Gresland, aujourd’hui investie par le SHED, c’est le regard d’homme. Savoir qu’un regard d’homme traverse souterrainement l’espace d’exposition où elle projette ses perspectives et que parcourront bientôt des regardeur·se·s, réjouit l'artiste. C’est donc dans la joie partagée de sales gosses préparant très sérieusement une bonne blague, que prend forme le titre de l’exposition, néologisme latinisé, doucement anachronique. Comme un aquarium contient de l’eau et un auditorium des sons à écouter, un « regardum », substantif agenré prononcé [ʁəɡaʁdɔm], pourrait être cet espace où circulent, s’échangent, s’agencent des regards. Évidemment, dans le contexte d’hyper-sensibilité à la moindre trace de soupçon d’une possible discrimination (et après des millénaires d’un patriarcat qui n’a pas rendu les armes), l’exposition d’une artiste femme s’appelant « regard d’homme » (même latinisé), ça détonne. Séverine, dans sa pratique, préfère construire un pont, récupérer et assembler des bouts plats et des bouts longs de mobilier mis au rancart, faire avec un quartier à coups de pieds, de clouteuse ou de visseuse, les organiser à l’œil en pleins et en vides, en hauts et en bas, plutôt que de se battre sur les mots.  Elle préfère fabriquer à plusieurs une maquette blanche, grande comme une ville et petite comme les fractions des meubles qui la composent, où nos corps se meuvent, travaillant ou flânant en touristes. Visuel > Séverine Hubard, Regardum.