A San Gimignano, vous serez bien accueillis. La ravissante petite ville de Toscane abrite depuis plus de 30 ans, unes des aventures les plus singulières du monde de l’art contemporain : la Galleria Continua. A deux pas de chez Dondoli, réputé pour être un des meilleurs glaciers du monde, vous serez libres d’y circuler à votre guise (trois lieux répartis autour de la place centrale) ou d’y bénéficier de commentaires experts. Allez-y sans même savoir quelles œuvres pour y découvrirez, la déception n’est jamais au programme. Jusqu’au 1er septembre, Ai Weiwei y présente une sélection d’œuvres retraçant son parcours artistique, notamment plusieurs tableaux récents réalisés en Lego.
C’était en projet depuis longtemps, passer à San Gimignano pour découvrir le biotope de la Galleria Continua. Fondée en 1990 par trois amis (Mario Cristiani, Lorenzo Fiaschi et Maurizio Rigillo), cette galerie est devenue une des institutions d’art contemporain parmi les plus reconnues au monde grâce à une volonté farouche de faire (re)vivre des lieux atypiques, en pleine campagne ou au cœur des villes, et surtout d’offrir un espace de libre création à ses invités. Le choix d’opérer dans des sites non conventionnels a appelé des propositions artistiques hors normes nouant des conversations uniques avec les diverses architectures ou paysages investis. Au cœur de chaque invitation, se développe l’idée d’une collaboration, de la réalisation d’un projet commun. C’est ainsi que la légende s’est construite. A partir de ce petit joyau médiéval de Toscane, cet esprit anticonformiste a essaimé. Aujourd’hui, il dispose de relais à Pékin, Les Moulins, La Havane, São Paulo, Rome, Paris et Dubaï. Comme le suggère son nom, la Galleria Continua s’applique à inscrire les artistes qu’elle reçoit dans la continuité de l’histoire de l’art et par là même de la poursuivre. Depuis plus de 30 ans, l’ancien cinéma de San Gimignano a vu défiler les plus grands noms de l’art d’aujourd’hui et ceux en passe de le devenir. Peu importe qui expose, vous y verrez le meilleur de son œuvre.
Pour quelques jours encore, Ai Weiwei est à l’affiche. L’exposition, qui retrace son parcours artistique de 1995 à aujourd’hui, présente également une large sélection d’œuvres nouvelles. Neither Nor, en français « ni l’un ni l’autre » souhaite mettre en garde contre le manichéisme des extrêmes et prône pour une pensée complexe qui refuse l’idée de vérité absolue et cherche à construire des voies alternatives. Tout au long d’un agréable parcours, le visiteur découvre installations, sculptures, photographies et surtout des œuvres créées par assemblage de briques Lego, dont l’artiste dit qu’elles lui évoquent son enfance et aussi des procédés actuels comme la pixélisation ou la numérisation. Mosaïques ou tapisseries d’un temps nouveau, les tableaux s’approprient tantôt des standards de l’histoire de l’art, tantôt des images passées dans l’inconscient collectif. Ce faisant, l’artiste en change la nature et la fonction. Ainsi, l’œil est-il surpris de découvrir un réfugié installé pour Un dimanche après-midi à l’île de la Grande Jatte (Georges Seurat) ou un cintre auprès de Vénus endormie (Giorgione), faisant mémoire, auprès de la déesse de l’amour et de la fertilité, de la brutalité des avortements quand ils ne sont pas autorisés par la loi. Depuis toujours, l’artiste pratique par télescopage et mise en perspective. Qu’il s’agisse de La Joconde barbouillée de gâteau par des activistes écologistes ou de récoltes anéanties par une invasion de criquets pèlerins au Pakistan (2020). Ai Weiwei refuse l’oubli, de la grande comme de la petite histoire. Se souvenir est une condition impérative pour penser, se déterminer, et agir. Chacune de ses œuvres est une maïeutique, qui enfonce le clou d’un art très politique.
Contact> Galleria Continua, San Gimignano, Italie. Pour la programmation et les autres adresses, cliquez !
Image d’ouverture> Vue de l’exposition Neither Nor d’Ai Weiwei, Galleria Continua, San Gimignano, Italie. ©Photo MLD
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