Solennelles, un brin austères dans leur costume de pierre, Rousse et L’Epistolaire se tiennent là en secrète invite ; elles sont de toute évidence et en parfaite connivence, les pièces maîtresses de la nouvelle exposition de Jean-Yves Gosti : un précieux et singulier alliage de force et de fragilité, l’estampille même du sculpteur, d’un art qui ne chipote pas. Si la vie se révèle parfois une tragédie pouvant prêter à sourire, la création chez cet artiste emprunte volontiers les traits d’une humanité protéiforme et partagée, tour à tour burlesque ou intensément dramatique. Ces déchirements, ces affrontements, le sculpteur les sublime dans son art, et fraie la voie d’un cheminement à travers deuils et fêlures. Au rythme des ruptures qui ont traversé sa vie, des visages et des corps sont nés de la pierre. Ces figures parfois lui ont résisté, retardant l’échéance de l’œuvre à venir, l’obligeant en permanence à extraire et à maîtriser une substance rétive de la matrice de son être, à lui donner forme, sans concession ni détours. Mais inlassablement, Gosti explore la possibilité d’un autre. Comme ces Janus que l’artiste affectionne et qui traversent son œuvre en un invisible courant. Une dualité qui ne laisse pas indemne…
Burin ou chalumeau, l’exposition fait ainsi la part belle aux œuvres de métal : découpes ludiques, objets quotidiens ou ange irradiant une belle sérénité ; un travail habité par une fausse nonchalance qui révèle un univers sous le sceau de l’universalité. Autant de scarifications dans son œuvre qui témoignent des blessures anciennes, des épreuves surmontées ; elles sont les marques indélébiles des émotions qui irriguent son travail, la signature d’un artiste messager de cet indéfinissable qui semble bien n’appartenir qu’aux seuls poètes.