Présentée la toute première fois dans les jardins du Palais Royal à Paris en 2008, l’installation Guardianes de l’artiste espagnol Xavier Mascaro voit une nouvelle version monumentale prendre ses quartiers sur le Paseo de Recoletos et celui del Prado à Madrid. Une garde d’imposants guerriers en fer brut mesurant chacun 3 m de haut et plus, en formation alignée, veillent sur les passants et les vestiges d’une fine embarcation d’un autre temps, sombre nef des Egyptiens, peut-être, pour le voyage dans l’au-delà. Seule en subsiste l’armature, long squelette effilé de 17 mètres.
Peintre avant d’être sculpteur, le regard et les préoccupations du premier s’immiscent dans l’œuvre sculpturale du second. La précieuse lumière, chère au peintre, traverse de part en part les sculptures de l’artiste. Accompagnée d’ombres portées, elle vient adoucir le caractère brut, la rudesse du métal, lui confère une légèreté presque aérienne évoquant tout à la fois la fragilité et la vulnérabilité de l’être et du monde qui l’entoure. Assis dans la posture méditative du lotus que l’on retrouve dans la représentation la plus divulguée de bouddha, ces puissants guerriers, et musiciens parfois, inspirent une certaine mélancolie, à la fois poétique et spirituelle.
Si l’artiste dans ses œuvres de taille plus modeste allie le fer, le verre, le bois ou encore l’étain, ses sculptures monumentales sont réalisées en fonte de fer, une technique dont il a fait l’apprentissage dans une fonderie industrielle et qu’il a adaptée aux besoins de son œuvre, à ses recherches. « Ce qui m’attire dans ce matériau, c’est la force et la chaleur qu’il transmet tout autant que sa nature organique. » L’alchimie qui régit le processus de fusion, contribue aux effets fortuits recherchés et pour lesquels l’artiste intervient ou non, à différentes étapes de la coulée, tout en établissant un dialogue avec la matière. L’expression de cette dernière est toujours préservée, jamais l’artiste ne cherche à gommer les traces de ce cataclysme improbable qu’est la fusion.
Imprégné de la culture de son pays, de son histoire, de ses conquêtes, de ses traditions et de ses icônes, qu’elles soient religieuses ou non, l’artiste se réfère plus volontiers à des sources d’inspirations plus lointaines, celles notamment du bassin méditerranéen, comme la sculpture égyptienne, phénicienne ou grecque. Parmi ses contemporains il apprécie le travail d’Anish Kapoor, de Tony Cragg et de Rachel Witheread, des artistes qu’il pense impliqués dans le dialogue avec la matière.