Explorer des mondes aux espaces et aux temps nouveaux, rencontrer des êtres éthérés, découvrir des objets animés, se laisser gagner par des hallucinations… Voici quelques-unes des propositions de Suspended Animation, une exposition proposée actuellement par le Hirshhorn Museum and Sculpture Garden, à Washington, aux Etats-Unis.
Environ un siècle après la réalisation du premier film d’animation, le commissaire d’exposition Gianni Jetzer a choisi d’inviter six plasticiens qui utilisent ce médium pour s’exprimer : les Américains Ian Cheng et Josh Kline, les Britanniques Ed Atkins (ci-dessus : Warm, Warm, Warm Spring Mouths, 2013) et Helen Marten, la Polonaise Agnieszka Polska et le Français Antoine Catala. Leurs travaux explorent certaines des interrogations posées à l’ère du numérique. Il est question, entre autres, de l’impact des mondes virtuels sur l’expérience du réel et de la numérisation de l’identité. « Les artistes ouvrent des espaces entre des visions de plus en plus sophistiquées du réel et la réalité elle-même », explique Gianni Jetzer. Pour lui, l’objectif de l’image animée n’est pas simplement de refléter le réel, mais bien de créer une autre réalité, qui ne peut être saisie que par l’imagination et qui joue désormais sur un pied d’égalité avec le monde physique. En science-fiction comme en médecine, l’expression suspended animation fait référence à un ralentissement des processus vitaux en vue de prolonger la vie. Appliquée aux nouvelles technologies, la notion renvoie à la substitution de la physicalité du corps par le virtuel. Une partie non négligeable de l’expérience humaine s’acquiert aujourd’hui à travers les écrans, tandis qu’une conscience désincarnée a pris le contrôle. Ces constatations ont conduit les artistes de Suspended Animation à réfléchir à cette nouvelle relation entre l’être et la technologie. Leurs œuvres parlent de simulation, de fiction et d’avatars, tout en susurrant à l’oreille des visiteurs : « Quid de notre corps de chair et de sang ? ».