Tout en glissade avec les marmottes

Il y a bien des années de cela, une amie d’origine danoise m’a expliqué une tradition (de son pays, peut-être, ou simplement familiale) qui consiste à tendre une corde (entre deux chaises, par exemple), à placer d’un même côté tous les invités au réveillon, à faire le décompte des 60 dernières secondes de l’année en se tenant par la main. Puis, à minuit pile, à sauter en chœur par-dessus la corde tendue pour symboliquement atterrir dans la nouvelle année.

S’ensuivit une ribambelle de sauts plus ou moins bien orchestrés en fonction des moments et des géographies : par-dessus un ruban en taffetas ou une ficelle de cuisine, en chaussures à talons ou en chaussons, dans un salon ou sur un balcon, seule ou en compagnie. A chaque fois, l’amusement est le même : adapter l’exercice à la situation, le renouveler pour le faire mieux exister, ajouter sa touche personnelle pour construire un petit rituel, gentil et appréciable par chacun. Ainsi cette nuit, après le douzième coup de minuit, nous nous sommes arrachés à 2022 (j’avais fini par m’y habituer) et décoller pour un futur intrinsèquement incertain.

Plus proche d’« objectif Lune » que de la conquête de Mars, la navette spatiale choisie pour accompagner ces vœux invite non pas à filer à la poursuite des petits hommes verts ou à tenter d’échapper à l’attraction terrestre, mais plutôt à transformer tous nos souhaits en un carburant inspirant. Avec elle, les vœux fusent tandis que des mains se tendent, des bras enlacent, des têtes surgissent sur les écrans… en quête de bonnes raisons d’espérer que 2023 sera meilleure que 2022. Mon portable vibre… des marmottes françaises, mais pour l’heure germanophones, assises sur des pierres de curling, mettent dans le mille et affichent un « Guten Rutsch ». J’espère que la glissade sera bonne et pour tout le monde ! Vous écrire pour le plaisir d’être avec vous, de partager ces quelques lignes sans conséquences. Vous dire finalement que j’aime profondément cette idée du saut, de l’élan, qui nous propulse on ne sait où mais ensemble.

Image d’ouverture> AdobeStock