Matrimoine ou l’abolition des frontières au château d’Oiron  

Il se passe ici quelque chose de l’utopie réussie, du partage et de la jubilation par la peinture. Fleuron méconnu du Centre des Monuments Nationaux, le château d’Oiron est en fête : ici même où fut créé il y a 30 ans, Curios & Mirabilia, l’une des toutes premières collections d’art contemporain dans un espace patrimonial – à l’initiative du ministre Jack Lang et de l’administrateur et commissaire de l’époque, Jean-Hubert Martin-, jusqu’au 22 octobre prochain, 65 drapeaux sous lesquels nous défilions le 14 juillet dernier, un panier de pique-nique à la main, pavoisent l’allée du Château. « Matrimoine » [1] l’exposition proposée par l’artiste peintre Laurent-Marie Joubert avec les artistes sud-africains Maria Motaung, Joyce NDimande, Seretse Moletsane, Bontlé Tau et le compositeur sonore Mo Laudi, a non seulement sollicité les publics locaux quant à la création d’une œuvre picturale collaborative, musicale et dansante à partir de techniques vernaculaires sud-africaines transmises par des femmes, elle redéfinit aujourd’hui même, les fondements d’une contemporanéité réjouissante et réparatrice par une réappropriation de l’histoire en cours et la passation de savoirs ancestraux, qui transgressent les frontières de genre, d’ethnies, ou de « castes » face à l’art. Du 30 septembre au 10 octobre prochain, une vingtaine de bâches issues de cette résidence d’artistes hors norme seront présentées dans la cour d’honneur du Palais Royal (vernissage le 5 octobre à 18 H 30) tandis qu’à Thouars, au Centre d’art La chapelle Jeanne d’Arc dans les Deux-Sèvres, est exposée jusqu’au 22 octobre, Courtyard une installation héraldique enchanteresse et puissante proposée par Laurent-Marie Joubert avec douze femmes muralistes sud-africaines [2] lors de la biennale de Johannesburg en 1995.

De gauche à droite Seretse Moletsane, Laurent-Marie Joubert, Nokufa Maria Motaung, Bontle Tau, Joyce Ndimande, au Château d’Oiron face au Blanket project. DR

Notre consœur, critique d’art et commissaire d’exposition Anne-Marie Morice*, fondatrice de Trans/verse propose dans les colonnes de l’observatoire en ligne, de revenir sur la genèse de cette aventure artistique, que nous vous partageons ici, avant de se pencher sur les enjeux qui sous-tendent le projet. 

Matrimoine est un projet de peinture un peu fou, extrême, qui embrasse plusieurs continents et cultures et se déploie sur 30 ans et dans différents contextes. A l’occasion de cet événement, l’installation Courtyard (1994-1995) et les tapisseries faites à Aubusson pour le Blanket Project (2003) sortiront des collections du LaM – pour la première –, et du FNAC – pour les deuxièmes. Courtyard est exposée tout l’été au Centre d’art contemporain de la Chapelle Jeanne d’Arc, à Thouars. Blanket Project figure en ce moment même dans l’accrochage de la collection.

Reportage sur le vif pendant la préparation du projet. 

A l’origine du projet on trouve l’artiste Laurent-Marie Joubert qui avait été invité en 1993 à créer les Emblèmes des œuvres de la magnifique collection Curios & Mirabilia rassemblée et disposée dans le château d’Oiron par Jean-Hubert Martin.  Pour communiquer sur les œuvres, au lieu de cartels, Laurent-Marie Joubert a créé une analogie directe entre l’objet d’art présenté et le fac-similé d’une gravure ancienne qu’il choisissait pour référer à un même domaine de questionnement, introduisant ainsi un espace spéculatif et ouvert pour le public. Les Emblèmes sont posés dans les salles sur des lutrins en bois « exotiques ». Les rapports de ressemblance qui se tissent entre des réalités différentes sont l’une des orientations prises par Laurent-Marie Joubert. Il les met en évidence en pratiquant une sorte d’entrecroisement de références, qui aboutissent à une représentation visuelle délimitée souvent par un cadre formel dont elle déborde vite les limites. Ainsi, en 1993 pendant sa résidence à la Villa Kujoyama au Japon, il choisit le format des écus, boucliers oblongs des chevaliers chrétiens, pour y enserrer des motifs d’héraldiques croisées, européenne et japonaise.

Cf : le texte d’Anne-Marie Morice texte dans Trans/verse : https://transverse-art.com/oeuvre/blasons-japonais

Courtyard (1994) installation exposée au Centre d’art Chapelle Jeanne d’Arc à Thouars, jusqu’au 22 octobre 2023 ©Philippe Baryga

En 1994, ayant pu apprécier l’intérêt de Laurent-Marie Joubert pour ce qui relève du dessin et de la peinture dans les codes de pratiques publiques, et les systèmes visuels qui font signe dans l’espace social et politique mondial, le même Jean-Hubert Martin, l’invite à faire partie des artistes français présentés à Africus,la première biennale d’art contemporain de Johannesburg qui a lieu un an après le début de la présidence de Nelson Mandela. Inspiré par Esther Malangu, l’artiste issue du peuple Nbedele que Jean-Hubert Martin avait révélée dans la célèbre exposition Les magiciens de la terre, – ainsi que par un documentaire sur les maisons peintes-, il décide d’un projet collaboratif avec des artistes muraliste sud-africains. Il se trouve que ces artistes sont toutes du genre féminin, dans la société traditionnelle les femmes étant chargées de l’apparence des murs extérieurs des maisons.  Parmi les dizaines de communautés peuplant le pays, Laurent-Marie Joubert invite à Johannesburg des femmes peintres des communautés Nbedele et Sotho. Il proposera pour structure commune d’intervenir sur les panneaux de signalétique routière qui depuis la Convention de Vienne, en 1968, sont soit triangulaires soit ronds dans une grande partie des états du monde. Laurent-Marie Joubert ayant institué le protocole de peinture en commun, le groupe réalisera Courtyard, installation acquise par la suite par le LaM de Villeneuve d’Ascq.

Cf : le texte de Jean-Hubert Martin, dans Trans/verse : https://transverse-art.com/oeuvre/courtyard

Atelier de peinture dans les attiques du Chateau d’Oiron, à visiter jusqu’au 22 octobre 2023 ©photo Philippe Baryga

C’est ainsi que l’été 2023, pour célébrer les trente ans de la transformation du Château d’Oiron en vaste cabinet de curiosités, invité par Jean-Luc Meslet, Laurent-Marie Joubert revient sur place et opère une nouvelle synthèse en initiant Matrimoine, action qui renouvelle sa collaboration avec des artistes sud-africaines. Cette fois-ci, il choisit de créer des drapeaux qui seront accrochés dans le parc du château, puis sur les arcades du Palais Royal à Paris.

Lire la suite du texte sur Trans/verse :  https://www.transverse-art.com/oeuvre/matrimoine-0

 


Trans/verse* est un instrument de recherche qui depuis 2016, produit et assemble des écrits sur des œuvres d’art, des années 1950 à nos jours. Sa fondatrice, Anne-Marie Morice est critique d’art, essayiste et commissaire d’exposition en France et à l’étranger (au Palais de Tokyo, au Grand Palais, à Biarritz, au Japon, à l’Ile Maurice, en Suède, en Autriche, en Algérie, ou encore lors des Rencontres internationales de la Photographie de Fès au Maroc etc.). Elle a d’abord écrit sur la photographie et la vidéo pour la presse (Création, Reflex, Libération, Télérama, La Croix, Révolution) et créait Synesthésie en 1995, la première plate-forme en ligne dédiée aux artistes contemporains numériques, ce qui lui valut entre autre, la distinction de Chevalier des Arts et Lettres. Le projet comprenait en outre un Centre d’art virtuel, des expositions, des résidences, des ateliers ainsi que la production d’œuvres d’art en ligne ou dans l’espace urbain.
http://www.transverse-art.com
 

INTERVIEW

Artshebdomedias a rencontré Laurent Marie Joubert à l’issue de cette nouvelle expérience collaborative partagée avec les peintres Maria Motaung et Joyce NDimande, le compositeur sonore et curateur MO Laudi ; Bonté Tau et Serestse Moletsane, tous deux artistes et curateurs en Afrique du sud…mais aussi avec le peintre et théoricien-chercheur Philippe Baryga (à qui l’on doit les clichés infiltrés), Carole Kohler œnologue et viticultrice à Thouars, Geneviève Momber traductrice retraitée et spécialiste du Japon ; et bien d’autres personnes, ami(e)s et thouarsais venus partager l’atelier de peinture. 

Laurent Marie Joubert, vernissage de l’exposition Matrimoine à Oiron ©orevo

« J’ai développé une œuvre protéiforme dans le champ des arts visuels, en cultivant un intérêt pour des champs artistiques considérés comme mineurs, images populaires, de propagandes, gravures, pratiques traditionnelles telles que l’héraldique, les blasons où l’usage de la couleur, pour produire un travail simple d’accès, évident, vibrant, développe Joubert. Dans les années 1990, j’ai glissé vers des pratiques collaboratives où je suis entré dans une logique de partage, de délégation et de collaboration. J’ai aimé travailler et réaliser avec d’autres, des œuvres, des expositions, des projets de diffusions, comme l’expérience des femmes artistes pariétales en Afrique du Sud, des femmes victimes de guerre en Serbie et Monténégro (2016), des historiens au Château d’Oiron (1993), un travail en duo avec l’artiste Raphaël Barontini pour une exposition de drapeaux réalisés à quatre mains pour Le Cyclop à Milly la Forêt, La figure sans visage (2016). » [1]

Drapeaux, au château d’Oiron ©orevo

Aguerri des vécus vernaculaires et toujours à la recherche de formes authentiques aujourd’hui menacées ; tentant au travers de la pratique picturale de nourrir des réflexions critiques à propos des pouvoirs et dominations verticales, Joubert développe une pratique d’atelier à la manière d’un studio de peinture, comme un chercheur, nourrissant l’arborescence de son activité, par des voyages de recherches.
 Ses pratiques collaboratives sont investies « d’une mission de pacification, de résilience, dont les objectifs sont la revendication d’un droit à la paix, de l’usage d’une mélancolie positive et nourricière, de la création d’images pacifiées» dit-il. Nous avons voulu en savoir un peu plus sur la fabrication de cette nouvelle héraldique dont les grandes bâches dépliées dans la cour d’honneur du Palais royal pour quelques jours seulement, apaisent nos âmes et grandissent notre humanité au moment même où les guerres fratricides redoublent de barbarie.

Matrimoine, au Palais Royal à Paris ©photo orevo

AHM :  Comment s’est organisée la peinture dans l’atelier des combles pour la création des matrices des 65 drapeaux du château d’Oiron et des 18 bâches recto-verso exposées au Palais Royal ?

 Ma foi, très naturellement, comme un jeu de société, chacun à son tour dépose des éléments qui vont être abondés, augmentés par l’action du suivant.

Vous n’aviez jamais peint avec Maria Motaung et Joyce Ndimande, pas plus qu’elles n’avaient peint ensemble : comment avez-vous fait collectif ? Voire communauté autour de cette résidence ? En intégrant Bontlé Tau et Seretse Moletsane qui ne sont pas peintres au départ… Et puis les publics dans votre jeu de tissage ?

Alors, la peinture, c’est un engagement, un sacerdoce, une fois que l’on a été piqué, c’est pour la vie, Maria à une longue pratique Joyce aussi. Seretse, suite à nos voyages découvertes a eu une révélation fulgurante de peinture, ( (Joubert a parcouru plus de 9000 km avec le jeune curateur sur les traces des femmes muralistes avec lesquelles il avait composé Courtyard en1994, ndlr) surtout au travers des peintures murales de Maria. Depuis il se revendique aussi peintre, il a désormais un énorme talent, très troublant …Bontle, elle, a un parcours plutôt orienté vidéo, mais elle s’est mise à la peinture avec beaucoup de curiosité de joie, ça a été très ludique. Pour les publics, on y reviendra.

Matrimoine, work in progress, dans l’ateleir des combles ©Philippe Baryga

Comment, opériez-vous au choix des couleurs et des formes tandis que Maria Motaung et Joyce Ndimande par exemple ont leurs propres motifs et répertoires de formes avec leur symbolique ancestrale ?

Tout au feeling, il n’y a pas de consigne, pas de règle ; on s’en parle, on en débat, et puis l’on décide. Chacun(e) à ses récits, ses motifs, ses choix colorés, là-dessus, on en est tous au même niveau ; tout le jeu est dans le retrait, il faut laisser de la place à l’autre, aux autres, le principe, la règle, c’est de mettre en place un réseau qui soit invitant, inspirant ; quant aux répertoires ancestraux, ils sont quasiment en voie de disparition, en voie d’extinction.

Matrimoine, Joyce NDimande ©photo Philippe Baryga

Il me semble que vous avez travaillé avec des pochoirs qui rappellent certains motifs du château, était-ce une des manières de faire résonner Matrimoine avec le Château ?

Les pochoirs, taillés dans du carton sont des outils de propagation, ils sont conçus comme des embrayeurs ; la plupart viennent de mes peintures, et surtout des encres que j’ai réalisées dans l’atelier qui m’est confié chaque année à Brooklyn (NYC-USA). Mais c’est vrai, qu’il y a aussi les lettres de la devise – HIC TERMINUS HAE- RET – (Ici est le terme/la fin) et la symbolique d’une double lune superposée en forme de sablier  de Claude Gouffier (le maître du château au XVIe siècle, dont les cabinets de curiosité furent la première collection des lieux, ndlr) et le monogramme de celui-ci.

Matrimoine, Joyce NDimande, ©photo Philippe Baryga

 Et vous, pouvez-vous nous dire quelques mots de votre motif (la fleur stylisée de chupa chups) que l’on retrouve dans certains drapeaux et dans l’installation CourtYard [2], mais aussi de Litema [3] dans la crypte à la chapelle Jeanne d’Arc ? Qu’est-ce qui vous intéresse dans ce motif ?

C’est une longue histoire, ça se passe en 1992, du côté de Stalingrad, c’est une période très sombre et qui est toujours d’actualité – la consommation du crack par des toxicos -, là il faut se référer au texte de Jean Hubert Martin relatif à l’installation de CourtYard publié en 1996. (Celui-ci explique les premières intentions de Laurent Joubert invité à participer à la biennale de Johannesburg, avant qu’il ait parcouru le pays, l’Afrique du Sud et rencontré les femmes muralistes, ndlr). Pour ce qui est de la fleur qui occupe le centre du papier d’emballage de la sucette, j’ai mis très longtemps à apprendre qu’il s’agissait d’un dessin créé par Salvador Dali, cadeau offert à son ami patron d’une très grosse confiserie.

Litema  : détail du mur laissé aux hommes  peintres Joubert et Baryga  ©photo orevo
Litéma, Chapelle Jeanne d’arc Centre de d’art de Thouars, Nokufa Maria Matshidiso Motaung en train de peindre le mur d’initiation aux hommes où elle sera rejointe par Sereste Moletsane et Philippe Baryga. ©Philippe Baryga
Litéma, Chapelle Jeanne d’arc Centre d’art de Thouars, Joyce NDimande peint à la main un cercle emblématique des motifs ancestraux transmis de merre en fille sur le mélange de terre de et bouse de vache qu’elle a au préalable mixé selon la tradition et appliqué sur une toile avec Maria Motaung ©Philippe Baryga

Considérez-vous la symétrie comme une constituante importante de l’idée d’harmonie et de paix que vous vouliez conférer à ces drapeaux et ces bâches ?

La symétrie est la base d’un dispositif de type trame, il est constituant de tout ce qui touche au tissage, le tissage, c’est le basic de toute civilisation ; selon Ronald Laing, les nœuds, les cordes, le fil, avec le langage et la céramique, nous avons les présupposés de ce qui civilise, un barrage aux barbaries, et les sédiments de la culture ; le tissage c’est la paix.

Quelle est votre relation au groupe Supports/Surfaces ?

Le groupe Support/Surface est né d’une nécessité politique : beaucoup de ses membres se revendiquaient Maoïstes comme beaucoup d’intellectuels à cette époque, surtout en protestation contre la guerre du Vietnam. Une bonne partie d’entre eux illustre ce qui vient d’être dit à propos du tissage. En ma qualité, d’artiste résistant, j’ai été obligé de remonter à contre-courant, ces mouvements d’avant-garde dominants de 60 à 70, 80 ; j’ai toujours été très curieux et intrigué par Patrick Saytour qui avait toujours des propositions joyeuses et kitsch, il vient de mourir, RIP.

A la Villa Arson, j’ai travaillé avec Noël Dolla, ce n’était pas une bonne période pour lui (il se séparait de sa femme Sandra Lecoq, ça le rendait para militaire et odieux). Au sein de l’école j’ai réhabilité le poste de peinture qui avait été occupé par Daniel Dezeuze. Il avait fait forte impression auprès de mes collègues les plus anciens : il démarrait l’année en jetant au sol les chevalets en bois qui équipaient l’atelier de peinture – c’était un instrument bourgeois pour un art bourgeois. J’ai réussi avec beaucoup de ténacité à imposer l’usage de l’atelier de peinture qui avait été conçu pour ça, et à ce qu’il retrouve cet usage exclusif. Avant mon arrivée, le lieu était dédié aux étudiants les plus avancés en phase de diplôme, en fait c’était devenu un fumoir, un salon mondain pour deux ou trois étudiants.

Matrimoine au Palais royal 2023 ©orevo

Un artiste comme Buren dont la radicalité sérielle des colonnes noires et blanches fut éclairée par les « bâches » de Matrimoine, dans la cour d’honneur du Palais-Royal, sous les regards ébahis du public et des habitants du quartier, fait-il partie des peintres qui vous ont marqué ?

Buren a été un bon peintre très prospectif dans les années 60 : on peut voir quelques rares toiles qui sont très intéressantes (il y en a une à Pompidou, hélas pas la meilleur), il a arrêté la peinture parce que cela intoxiquait ses enfants, il vivait et travaillait en famille dans un appartement très modeste dans Paris intramuros. Je n’ai pas cru bon de relever l’apparente provocation que pouvait constituer la présence de Matrimoine aux côtés de ses colonnes. 

Vous sentez-vous plus proche des surréalistes par le processus engagé dans cette œuvre, dans la manière de créer ensemble tel un cadavre exquis ?

Personnellement j’ai des curiosités et des intérêts pour un large spectre d’artistes et d’arts, de périodes et d’Histoire, ce qui me donne d’ailleurs cette sensibilité au Patrimoine / Matrimoine : en fait l’intelligence me touche beaucoup plus que la production ; je suis du côté d’Emet Grogan, du mouvement hippie, je suis un vieux hippie candide et innocent. Je ne souhaite pas énumérer tous les artistes qui me concernent.

Accrochage des drapeaux au chateau d’Oiron par les cordistes ardéchois ©Samuel Quenault

Quand ou comment vous est venue cette idée d’exposer les drapeaux sur des cordes comme de grands paréos ? Plutôt que de les planter le long de l’allée, comme l’on pavoise habituellement pour les joutes ou les fêtes ?

Toutes mes meilleures idées me viennent la nuit en songe en apparition. Pour Oiron, la proposition est une solution par défaut, les pelouses du parc longeant l‘allée centrale sont un périmètre archéologique, pas possible de faire des trous pour venir y planter des mats de drapeaux, c’est mon réseau amical ardéchois qui va me guider vers ce choix avec Arthur et Alex cordistes de leur métier, qui ont fait un travail remarquable,

©Laurent Marie Joubert, détail  « Héro !  » 1998,  oeuvre composée  de 6 peintures sur des couvertures de journeaux publiés en Afrique du Sud  – reflet des fenêtres du château sur le sous-verre qui portège les peintures  ©orevo

Quelle émotion avez-vous ressentie face à la « vision sonore » de CourtYard dans la chapelle jeanne d’Arc de Thouars, exposée pour la première fois en 1995, dans les espaces périphériques de la biennale de Johannesburg « Africus » ?

C’est la première fois que CourtYard trouve place dans une chapelle. L’effet est déflagrant, avec la création sonore de Mo Laudi, c’est un grand moment.

Courtyard (1994) installation exposée au Centre d’art Chapelle Jeanne d’Arc à Thouars, jusqu’au 22 octobre 2023 ©orevo

Biograhie de Laurent Marie Joubert  : Né à Narbonne en 1952, lauréat de la Villa Kujoyama à Kyoto en 1993, Laurent Marie Joubert, a suivi des études à l’école des Beaux-Arts de Paris. Il a lui-même enseigné dans de nombreuses écoles d’arts en France (Nancy, Bourges, Lumini, Dunkerque, Villa Arson …) et développé des projets dans différentes parties du monde : au Japon avec Des Fleurs fauchées (1993), en Afrique du Sud avec Courtyard (1995) et Blanket Project (1998), en Amérique du nord avec Hirsch Farm Project (1996), en Chine dans le delta de la rivière des Perles, avec Cavaliere y Nansha (2008). Son travail est conservé dans les collections de nombreux FRAC, au Musée National d’Art Moderne de Paris, au Szépmuvészeti Museum (Budapest), à la Fondation Cartier (Paris), au Cnap centre national des arts plastiques, au LaM – Lille Métropole Musée d’art moderne, d’art contemporain et d’art brut (Villeneuve d’Ascq). Il est lauréat de la Villa Kujoyama à Kyoto en 1993.

[1] Nous avions rencontré les artistes lors d’une interview  à cette occasion, dont les chemins se croisent six ans plus tard : Pendant que Joubert terminait l’accrochage de Matrimoine au Palais Royal, Barontini peaufinait ses fresques et bannières pour l’exposition « we could be héros » qui consacre son travail au Panthéon du 19 octobre 2023 au 11 février 2024. dans le cadre du programme « un artiste, un monument » proposé par le Centre des Monuments Nationaux

[2] : Courtyard (1994-1995) : 82 panneaux de signalisation routière, réalisés sur une proposition de Laurent-Marie Joubert avec Rosinah Dlamini, Sarah Dlamnini, Laurent-Marie Joubert, Sarah Mahlangu, Maria Makhamele, Leah Mkhwebane, Mavis Mlawe, Mmaleboang Mokoena, Puleseletso Mokoena, Maria Moloï, Julia Muhali, Francina Ndimande, Rineth Sieda
, fixés sur des mâts comme autant de boucliers, de sagaies ou de slogans de manifestation, exposée en 1995, dans les espaces périphériques de la biennale de Johannesburg. Collection du du LaM, LilleMtropole Musée d’art contemporain et d’art brut. « Fixées sur des mâts comme autant de boucliers, de sagaies ou de slogans de manifestation […] ces œuvres réactivent aussi la dimension politique de la tradition muraliste sud-africaine, qui fut utilisée comme un véritable outil de résistance face à l’oppression de l’apartheid. Il n’était pas rare, en effet, de voir éclater sur les façades des maisons le vert et le jaune de l’A.N.C, » précise la feuille de salle du Centre d’art la chapelle Jeanne d’arc à Thouars signée Gaultier Boivineau. L’installation est augmentée par Daughters of the Dust. Sons of the Soil (10 min – 2023) une composition sonore de Ntshepe Tsekere Bopape (Mo Laudi).

[3] Litema : peintures murales in situ : Nokufa Maria Motaung : Mmoropotso et Tema ya lebollo, Joyce Ndimande : Iguphu et Umgwalo, Laurent Marie Joubert avec Philippe Baryga : Cosmos.

De gauche à droite Joyce Ndimande, Seretse Moletsane, Mo Laudi (création sonore). Nokufa Maria Matshidiso Motaung.©Philippe Baryga

Complément d’information :

MATRIMOINE : Botho/Ubuntu : Je suis car nous sommes, Ubuntu/Umuntu ngmuntu ngabantu (en Zulu) Botho/Motho ke motho ka batho (en Sotho)
Un projet collaboratif (2022-2023) de Laurent Marie Joubert avec cinq artistes Sud-africains : Mo Laudi (création sonore), Nokufa Maria Matshidiso Motaung, Joyce Ndimande, Seretse Moletsane, Bontle Tau (peinture) intégrant, la présentation d’œuvres de Laurent-Marie Joubert en lien avec des projets liés à l’Afrique du sud au sein de la collection Curios & Mirabilia (1993). Commissaire et administrateur du château : Jean-Luc Meslet

  • Du 14 juillet au 22 octobre 2023, au Château d’Oiron, 79100 Oiron
 – Ouvert tous les jours de 10h30 à 17h3, du 1er octobre au 31 mai :  Dernier accès 1h avant la fermeture. Tel : 05 49 96 51 25
  • Du 24 juin au 22 octobre 2023, au centre d’art La chapelle Jeanne d’Arc, à Thouars.
  • Du 30 septembre au 10 octobre 2023, au Palais-Royal, à Paris. Vernissage le 5 octobre à 18 H 30 en présence de la ministre de la culture.

Visuel d’ouverture > Matrimoine (2022-2023) : vues de l’allée centrale  du château d’Oiron,  65 drapeaux imprimés de 1,3 m x 2,6 m, 2,6 m x 5 m, 4 m x 9 m. Artistes : Laurent-Marie Joubert, Mo LAUDI (création sonore), Nokufa Maria Motaung, Seretse Moletsane, Joyce Ndimande, Bontle Tau (peinture) avec la participation des publics. ©Photo Pascal Miele

 

Print Friendly, PDF & Email