Depuis son atelier de Melbourne, le plasticien d’origine anversoise Sven ’t Jolle observe les désordres du monde. Artiste engagé, il a aussi le sens de la forme et des matériaux. De ses sculptures, installations et dessins, qu’il présente au Wiels jusqu’au 19 mars, il fait un terrain de jeu poétique des ambiguïtés et des impasses de nos sociétés contemporaines.
Quelques planches de bois, un bout de tissu moulés dans du plâtre dessinent la silhouette d’un pauvre hère prêt à se faire extraire une dent à l’arrache par un fil attaché à une clenche de porte. La sculpture de Sven ’t Jolle qui donne le sous-titre de sa première grande exposition en Belgique et au Wiels s’appelle Affordable Tooth Extraction (extraction dentaire abordable) et s’inspire d’une expérience personnelle. Installé en Australie, l’artiste belge s’est vite rendu compte du coût prohibitif des soins dentaires et il a dû se résoudre à se faire arracher une dent par des étudiants en dentisterie.
Les 17 pièces exposées distillent une critique lucide, mais pas agressive, de la société contemporaine. L’effritement de l’Etat-providence, la gestion de la vieillesse, la place des sans-papiers, le rêve américain ou le statut des artistes, tous ces thèmes sont abordés sans discours, mais par une métaphore et des œuvres d’une grande force plastique qui peuvent parler à tout le monde. Les matériaux de récupération, le bois, les métaux de chantier et le plâtre, qu’il affectionne pour les sculptures, renforcent leur apparente fragilité et dégagent une discrète poésie. Tout l’inspire : l’actualité, son quotidien, ses voyages, comme les cultures populaires ou l’histoire de l’art. Chaque œuvre est riche en références, tout en étant toujours très accessible.
Il aime aussi les détournements de formes, de symboles et de matériaux. En voyage aux Philippines, il a remarqué les panneaux de basket, bricolés avec trois fois rien. Il en réalise un avec un bidon d’huile et des planches. Il se dresse comme un personnage décharné qui titille le rêve américain. Les réserves de musées occidentaux regorgent de statuettes votives issues des anciennes civilisations du croissant fertile, qui ne connaissaient ni l’écriture ni le papier. L’artiste les a agrandies jusqu’à taille humaine pour en faire des personnages ironiquement baptisés Sans-papiers. (…)
Dans le cadre d’un partenariat engagé avec notre consœur belge Muriel de Crayencour, fondatrice et rédactrice en chef du site d’actualité artistique belge Mu-inthecity.com, nous vous proposons de poursuivre la lecture de cet article d’un clic.