Du studio national des arts contemporains- Le Fresnoy, au Marseille International Film Festival où sera projeté son film Love and Revenge, découvert dans une chambre d’hôtel à Lille lors du salon Around Vidéo, Anhar Salem rafle tout jusqu’aux cimaises de l’ADAGP, à Paris. Dernier jour pour voir son exposition à Paris qui s’intitule pourtant Not Everything Not Everywhere Not All at Once !
La Révélation Art numérique – Art vidéo récompense chaque année d’une dotation de de 5 000 € un jeune talent sélectionné parmi les étudiants de deuxième année du Fresnoy-Studio national des arts contemporains, et permet à l’artiste de bénéficier d’un portrait filmé et diffusé sur le site d’Arte et la chaine YouTube de l’ADAGP, ainsi que d’une présentation sur ses cimaises.
Nous y sommes : sur un tapis de salon – vue du plafond comme s’il s’agissait d’une capture d’image prise d’une caméra de surveillance – et bordé de coussins bariolés, défile la vidéo, Mashallah. Why did you cross the indian Ocean (35’) réalisée en 2023. Sur les murs un imprimé hallucinatoire des sites, des pubs ou des vidéos consultés sur YouTube ou les réseaux dont l’échelle de chaque motif est celle d’un smartphone, comme autant de briques qui ceignent l’espace intime. Nous voilà plongé(e)s au centre du salon familial, ou plus exactement du « shop-restaurant » improvisé par la mère de l’artiste en Arabie Saoudite, dans l’intimité de ces femmes, des voisines, amies, immigrées, marginalisées par la société saoudienne qui se retrouvent là pour échanger autour d’un repas partagé, et dont Anhar ne filme que les jambes recouvertes et les pieds !… Anhar Salem nous invite à plonger au cœur d’une matière narrative basée sur des tentatives personnelles et collectives de passer les frontières des territoires du réel et du numérique, de l’intime et de l’indicible.
Love and Revenge (2021), qui a été sélectionné pour le FID Campus de la 34e édition du Marseille International Film Festival, du 4 au 9 juillet prochain, a été tourné pendant le covid entre Tourcoing et Djeddah : une adolescente saoudienne Doody tente d’échapper à la réalité quotidienne aliénante à travers son avatar dont le filtre Instagram arbore les archétypes de la femme fatale occidentale. Tout en questionnant son rapport à l’image, Doody exprime son désir existentiel de liberté et d’affirmation de soi, jusqu’à ce qu’elle perde le contrôle de son avatar…
Vivre son époque, en évoquer la schizophrénie, les mensonges, le téléscopage des esthétiques ordinaires, populaires, autant que le partage à travers le monde, de ce qui nous fait chair… Née en 1993 en Arabie Saoudite, Anhar Salem veut tout dire, de son époque, de ses racines plurielles indonésiennes et yéménites, et son regard n’est pas dupe. Dotée d’un talent évident pour l’image à l’écran, Anhar Salem est une réalisatrice née, une artiste à suivre au delà des frontières, qui semble bien avoir trouvé ici son médium !
Not Everything Not Everywhere Not All at Once : ADAGP jusqu’au 30 juin. – 11 rue Duguay-Trouin, 75006 Paris.
Visuel > D’après Untilted 2018 Selfie Reproduction ©Doody _ Log in Log out Identities 2023 1 sur 5 Emballages plastiques imprimés 17 x14 cm ©Anhar Salem. Photo ©orevo