Se déplaçant depuis vingt ans à travers le monde entier, la prochaine Conférence des Nations unies sur les changements climatiques – la COP21 – doit se tenir du 30 novembre au 11 décembre à Paris. Dans l’idée de permettre aux causes écologiques de s’affranchir des contextes politique et économique, et de leur complexité, l’association COAL (1) a initié ArtCOP21, en partenariat avec le projet Cape Farewell (2), un festival artistique pluridisciplinaire – il regroupe plus de 300 événements – qui a débuté dès le mois de septembre dans une quarantaine de pays. En France, la programmation se concentre essentiellement sur Paris et dans ses environs.
Installations, expositions, parcours, spectacles et autres conférences de sensibilisation destinés à un public le plus large possible : pas moins d’une trentaine d’événements – aux formats les plus variés et organisés en collaboration avec une centaine d’acteurs culturels – sont au programme d’ArtCOP21 en Ile-de-France. Parmi les rendez-vous à ne pas manquer, citons celui donné jusqu’au 14 février par Sterling Ruby au Musée de la chasse et de la nature : l’artiste américain y a installé dans la cour Stoves, une série de poêles à bois monumentaux régulièrement alimentés en combustible et réchauffant inutilement l’air ambiant comme pour mieux souligner l’inconséquence de notre gestion de l’environnement, de notre consommation effrénée et du gaspillage qui lui est inhérent. Jusqu’au 5 novembre, le Centre culturel irlandais accueille Et si on s’était trompé ?, une exposition qui réunit les travaux de 16 artistes irlandais – vidéos, installations et photographies – autour de la question des changements climatiques et de l’impact de nos modes de vie sur l’environnement. De son côté, la galerie Felli présente, pour la première fois à Paris – à compter du 5 novembre et jusqu’au 1er décembre –, le travail du Cubain Rubén Fuentes (né en 1980). L’occasion de plonger dans un univers pictural minutieux et poétique où la nature occupe une place centrale. La plasticienne Naziha Mestaoui invite pour sa part tout un chacun à vivre une expérience unique et engagée par le biais de son smartphone : baptisée One Heart One Tree, elle offre la possibilité – grâce à une application dédiée – de créer un arbre virtuel, « qui poussera au rythme du battement de votre cœur » et sera projeté avec des milliers d’autres sur les monuments de Paris entre le 29 novembre et le 4 décembre. Chaque arbre aura son pendant dans la réalité puisque bel et bien planté dans le cadre de différents programmes de reforestation à travers les cinq continents.
Autre action menée dans l’espace public, Le climat au pied du mur est un parcours conçu par cinq street artistes conviés par l’association Care à s’interroger sur les impacts du changement climatique sur les droits humains – habitat décent, justice sociale, alimentation et accès à l’eau potable. Les œuvres de Da Cruz, Doudou Style, FKDL, Koralie et Stoul sont à découvrir le long du canal Saint-Martin et du canal de l’Ourcq jusqu’au 19 décembre. S’il faut bien clore cette liste non exhaustive de propositions attrayantes, difficile de résister à un dernier détour par Saint-Denis, où le Parti Poétique (3) a établi ses quartiers il y a une dizaine d’années. Le collectif d’artistes, de constructeurs et de chercheurs y mène un projet transdisciplinaire – s’articulant autour des abeilles et de la notion de « pollinisation de la ville » – qui interroge le territoire urbain. En avril dernier, il a inauguré la République forestière et le projet Change !, un double programme d’actions artistiques et environnementales – notamment de reforestation urbaine – destiné à faire le lien entre « les habitants des villes, les abeilles, les arbres et leur intérêt commun à s’engager pour la lutte contre le réchauffement climatique ». Bonnes découvertes !(3) Le Parti Poétique se définit comme « un regroupement d’artistes, de penseurs et de faiseurs réunis autour de questions et d’abeilles qu’ils posent dans l’espace public. Comme son nom ne l’indique pas, ce collectif interroge le quotidien et essaye d’aller voir ailleurs si il y est, et ce notamment par l’intermédiaire de l’art et des ressources des territoires. »
(1) L’association COAL (Coalition pour l’art et le développement durable) a été créée en France en 2008 par des professionnels de l’art contemporain, du développement durable et de la recherche dans le but de favoriser l’émergence d’une culture de l’écologie.
(2) Le projet Cape Farewell a été initié en 2001 à Londres par l’artiste britannique David Buckland dans l’idée de proposer des réponses culturelles aux défis climatiques.
Alexander Hartley, Prix COAL 2015
La sixième édition du prix COAL Art et Environnement a vu 389 artistes et collectifs, provenant de 51 pays, soumettre au jury une initiative citoyenne, dénonciatrice ou progressiste. Ils étaient dix (1) à avoir été sélectionnés pour venir défendre leur projet il y a quelques semaines à Paris, lors d’une soirée, organisée le 17 septembre au Musée de la chasse et de la nature, au terme de laquelle le prix – comprenant une dotation financière et une résidence de création artistique au domaine de Belval (Ardennes) – a été attribué à Alexander Hartley (né en 1963). L’artiste britannique a été salué pour son projet Nowhere, une installation évoquant un espace utopique, en l’occurrence une île, sans frontières ni juridiction, dédié à la libre pensée. Il y rassemble « les biens communs » existant aujourd’hui hors des lois et régulations des 196 pays de la planète : une collection d’objets provenant de « territoires sans maître », comme de la poussière cosmique ou des pierres lunaires, par exemple. Une réaction aux différentes crises que nous connaissons, accentuées d’après l’artiste par la multiplication des frontières. L’installation prend la forme d’une plateforme mobile pouvant être transportée et aménagée. Cette année, a par ailleurs été décerné un Prix COAL Spécial Océans à Elsa Guillaume, pour son projet Cosmographie corallienne. La jeune artiste française se voit offrir un mois de résidence sur le navire Tara dans le cadre d’une mission menée dans l’Océan Pacifique par l’association Tara Expéditions sur le corail.(1) Collective Disaster (Belgique, Grèce, Italie), FICTILIS (Etats-Unis), Alex Hartley, Monte Laster (Etats-Unis, France), Livin Studio (Autriche), Mare Liberum (Etats-Unis), MELD (Etats-Unis, Australie, Grèce), Julie Navarro (France), Stéfane Perraud et Aram Kebabdjian (France), Yesenia Thibault-Picazo (France).