Patricia Erbelding est peintre, mais s’adonne également à la sculpture, la photographie et la vidéo. Elisabeth Oulès, elle, sculpte, se fait parfois poète et depuis toujours dessine, le croquis participant pour elle, à l’évidence, « à la genèse d’une sculpture ». Les deux artistes partagent une même tendresse et une insatiable curiosité pour le métal. La première dessine sur la toile des traits et des courbes non à l’aide de craies, encres ou peintures mais avec de la limaille de fer. Puis elle asperge le métal d’eau, provoquant un début d’oxydation. Les traces virent alors peu à peu au brun orangé et poursuivraient volontiers leur libre cheminement, si l’initiatrice de ces lignes de vie ne venait en reprendre le contrôle pour les fixer à jamais sous une fine couche de cire. Cette cire, qui vient stopper le processus d’oxydation, est aussi pour l’artiste un moyen « d’accéder à une forme de conservation qui renforce l’intemporalité qui (lui) est chère ».
La seconde a fait de la tôle rouillée son matériau de prédilection. Son atelier regorge de clous, cornières, rivets, gonds et tôles, autant d’objets en ferraille sauvés du rebut qui attendent patiemment d’entamer leur nouvelle vie. L’artiste n’ayant que peu d’attrait pour la sophistication, ses indispensables outils se résument à un étau, une enclume, une disqueuse et un poste à souder. Posée sur chacune de ses œuvres, une figurine à la silhouette élancée vient rappeler l’infiniment petit qui caractérise l’homme et la grandeur qu’il incarne par son immobile verticalité.
Les deux femmes exposent ensemble à Paris, dans ce lieu aussi atypique que chaleureux qu’est le 6, Mandel. Tandis que les larges toiles de Patricia Erbelding prennent possession des murs de la galerie, les sculptures d’Elisabeth Oulès investissent son espace ; les œuvres s’interpellent, un dialogue complice s’établit, et c’est un bonheur de se trouver là, à leur écoute.