Le retour sur image d’Ugo Sébastião

Il ne reste plus que quelques jours pour profiter de la première exposition personnelle du Lyonnais Ugo Sébastião. Présentée à pal project, à Paris, Persistant Shapes présente un ensemble pictural aux confins d’une esthétique post-punk et d’une iconographie baroque.

« Qu’est-ce qu’un peintre ? » est la grande question d’Ugo Sébastião. Né en 1998, à Lyon, il étudie d’abord le design à La Martinière Diderot avant de s’engager dans un cursus artistique. Après trois ans en Alsace, à la Haute Ecole des Arts du Rhin, il revient faire une année de master aux Beaux-Arts de sa ville natale. « Je ne pense pas être un peintre ou du moins je préfère l’idée d’être un faux peintre ou simplement un artiste qui utilise la peinture, qui peut convoquer son histoire, tout en étant extérieur à ce qu’elle est, et parfois, dans certains gestes je peux en devenir un. » S’il n’est pas tout à fait question de peinture alors de quoi d’autre ? Son travail est celui d’un monteur qui sélectionne, découpe, redimensionne et travaille des images de tableaux glanées au fil du web. Considérée comme un liant, la matière picturale rassemble les différents éléments. Elle est la garante de l’unité.

Vue de l’exposition Persistant Shapes, Paris, 2022. ©pal project

« Sur Google Images, il scrute les tableaux ‘’oubliés’’ des peintres de l’époque de la Renaissance Italienne comme Fra Angelico ou du classicisme français avec Philippe de Champaigne et en extrait des détails auquel il donnera un second souffle. Grâce à un recadrage millimétré, il les sort de leur contexte et nous les présente de façon neutralisée, permettant à chaque visiteur une lecture unique et personnelle. L’artiste étudie avec autant de distance les tableaux du baroque romain que son feed Instagram. Cette distance, il l’impose aux visiteurs grâce à l’utilisation du monochrome et d’un vernis ultra-brillant qui nous forcent à nous éloigner ou à nous rapprocher », explique la curatrice Violette Wood.

The bird (n°1), 2021, huile, silicone, pigment sur panneau de bois , 18 x 24 x 2,5 cm.

Dans la proposition d’Ugo Sébastião, la mise en avant du fragment stoppe le regard, le mobilise sur un détail du tableau d’origine devenu une image parmi les milliards charriées par Internet. De représentations en transformations, la peinture se renouvelle. « J’essaye de laisser différentes couches de lecture à mes productions, que ce soit par des références à l’histoire de l’art ou les matériaux utilisés. Chaque œuvre est composée d’éléments tangibles sans être dans une logique de cause à effet. Le spectateur est à la fois traducteur et inventeur du discours par les éléments proposés. » Persuadé que l’image est une matrice de tous les possibles plastiques, Ugo Sébastião peint pour lui rendre sa matérialité, sa puissance et sa force.

Image d’ouverture> Les sourds n’entendent pas l’orage, Ugo Sébastião, 2019, huile sur lin, 150 x 300 x 5cm.

Contact> Persistant Shapes – Ugo Sébastião, jusqu’au 8 octobre, pal project, Paris.

Un escalier sans marche, 2020, huile et mélange à base de cire blanchie sur lin, 150 x 300 x 6,5cm.
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