Pascal Tassini | Nexus

Dans sa genèse, si l'art fut cultuel voire spirituel, celui de Pascal Tassini s'inscrit en droite ligne dans cette généalogie. Né trisomique en 1955, il commence par fabriquer des peuplades de terre, élémentaires, hiératiques, espèces de nok d'outre-Quiévrain. Mais très vite, il veut habiter le monde, son monde. Et construit, pour ce faire, un havre au sein même du Créahm de Liège qui l'accueille depuis des années : une cabane faite d'objets dérobés dans l'institution et inextricablement liés les uns aux autres par des tissus réunis en chapelets de nœuds. Comme chez Schwitters, le Merzbau de Tassini a toujours été protéiforme et évolutif. Mais à mesure que ce foyer symbolique prenait de l'ampleur, le statut de Tassini s'affermissait. Il y recevrait désormais ses visiteurs en « docteur Tassini », dans une délicieuse inversion des rôles. Mais ce « mari caché d'Annette Messager » - comme l'écrit Léa Chauvel-Lévy - pour parachever sa transformation, se mit alors à produire, durant des années et selon un processus similaire, des accessoires destinés à servir lors de noces somptueuses. À la manière de l'oiseau jardinier, Tassini se lança dans une opération de séduction d'une créativité et d'une majesté sans entraves, en concevant – et revisitant - des robes et des coiffes de mariée, des traînes et des bouquets, des alliances et des souliers. Jusqu'aux mobiliers nuptiaux qui prenaient, à la suite de ses interventions, un petit air baroque, rocaille parfois, fait d'excroissances jubilatoires et de métamorphoses organiques. L'artiste se tenait donc prêt, et le fit savoir en rédigeant des demandes en mariage faites d'un simulacre d'écriture d'une densité éperdue ; une grapholalie seulement rompue, parfois, de deux oculus au bas de la feuille et symbolisant les alliances. À défaut d'une épouse, il lui vînt des admirateurs du monde entier, et même si nous avons eu la chance de pouvoir laisser entrevoir son immense talent lors de quelques expositions collectives, suivis en cela par des lieux prestigieux comme, cette année encore, la Maison rouge, il s'agit de sa toute première exposition monographique en galerie.cés. Visuel : Pascal Tassini (TAS023) sans titre, assemblage textile noué, (68 x 157 x 32 cm).