John M Armleder

« Parmi les œuvres présentées dans l’exposition de John M Armleder à la galerie Almine Rech à Paris, au côté de peintures murales de 2018, figure une nouvelle série de Puddles Paintings ou peintures en flaques. Réalisées par déversement de matériaux hétérogènes à même la toile (peinture acrylique, vernis, liquides pour surfaces extérieures, mais également poudres, confettis, paillettes et petits objets décoratifs), ces peintures s’élaborent selon un mode doublement aléatoire : leur dépôt sur la surface à peindre n’est pas contrôlé par un geste de maîtrise artistique et leur mélange provoque un changement chimique de leurs propriétés originelles, tant sur le plan chromatique que physique. A cela s’ajoute que l’application des substances de la peinture est réalisée à plat et que la verticalisation du résultat, une fois les couches formées, modifie encore profondément l’aspect du tableau. Ainsi, se dessinent de nouveaux plissés, se forment des rigoles irisées et surgissent d’une couche précédemment recouverte d’improbables vagues chromatiques, quand n’éclatent pas des “bulles” qui s’étaient formées à la surface, déversant soudainement un magma de composantes à densité variable sur les accrétions affleurantes. Cette technique picturale, qui doit autant peut-être à la vulcanologie qu’aux principes de composition aléatoire présents dans l’histoire de l’art de la deuxième moitié du vingtième siècle, permet à l’artiste de programmer une perte de contrôle, de déclencher des accidents et des éruptions inattendues, bref : de combiner le “lâcher prise” cher à John Cage avec une forme d’expressivité sans subjectivité. » Lionel Bovier, historien de l’art et directeur du Mamco, à Genève. Visuel : Pruniers fleuris, John M Armleder, 2018. Photo Annik Wetter.