Dorian Cohen | Dans l’Intérieur des Silences

"Avant d’être peintre, Dorian Cohen était urbaniste et ses premières peintures étaient des vues urbaines ultraréalistes sans personnage, mais déjà habitées par une végétation insolemment verdoyante. Ainsi, il part toujours d’une composition précise où le décor, le paysage, enveloppe les personnages, comme l’environnement dans lequel on vit détermine nos destinées. Zola, Maupassant, ne sont pas loin, guides intellectuels d’un néo-naturalisme pictural visant à scruter le négatif de nos existences. Ce que l’on ne regarde pas, ce dont on ne parle pas, mais qui nous façonne et nous destine malgré nous. Et c’est bien dans le courant du quotidien que ce déterminisme social se perçoit le plus fortement. Les cuisiniers au travail dans l’arrière-boutique d’un restaurant, une conversation secrète entre deux amis, les sentiments d’un jeune père face à son petit garçon... Dos courbés, regards figés, gestes dans l’attente, poses toujours silencieuses, introspectives : tout indique un certain poids de l’existence tandis qu’au mur, accrochées comme des indices pour l’œil averti, une affiche d’une exposition de Toulouse-Lautrec ou de Félix Vallotton résonne comme un clin d’œil de peintre à ses aînés mais aussi comme une revendication d’un certain genre de peinture qui n’est pas mort. Aujourd’hui, la figuration revient en grâce, portée par une jeune génération d’artistes qui s’adonne à nouveau à la scène de genre. Celles que nous livrent Dorian Cohen ont le mérite de susciter l’émotion du récit, voire même du roman, soutenue par un magnifique traitement de la lumière, chargée en couleurs, qui ne sont autres que des sentiments. Pour preuve, c’est à un cycle que l’artiste dit s’attaquer, et non à une simple série, souhaitant que sa peinture évolue avec ses personnages à la manière d’une chronique intimiste de notre époque, sur le temps long. Le roman pictural de Dorian Cohen ne fait que commencer." Julie Chaizemartin. Visuel > Dorian Cohen, Sans Titre, 2022. Huile sur toile, 180 x 230 cm. © Suzan Brun. Courtesy Dorian Cohen / Paris-B.