"Quelle relation Giuseppe Penone, Wolfgang Laib, Cristina Iglesias et Philippe Cognée entretiennent-ils au vivant? Peu de choses au fond les prédestinaient à être réunis sous les auspices de la Nature. Nés au milieu du xxe siècle aux quatre coins de l’Europe, peintre et sculpteurs d’horizons épars et de cultures différentes, ils ont, par leur « écriture » singulière, donné corps à des univers qui ne se font pas spontanément écho. Pourtant, plonger dans les arcanes de leurs travaux respectifs, c’est unanimement se laisser saisir par l’alchimie des substances et la poésie des éléments. L’esprit du poème de Lucrèce De la nature, ode à la matière et à la volupté, résonne comme un écho lointain à chacune de leurs productions. Un « inconscient romantique » de la nature habite leurs travaux au fort pouvoir d’évocation poétique. Cognée, Iglesias, Laib et Penone nourrissent une relation sensuelle à la création, sensualité que la modernité a parfois laissé de côté. Elle se manifeste chez eux par l’empathie singulière qu’ils nouent au monde, en rupture avec l’indifférence qui a pu prévaloir à l’égard de la nature. La beauté intime des matières est constitutive de travaux où se laissent saisir la douceur des textures, la prégnance de matériaux ductiles, l’importance de la peau ou de l’empreinte comme zone de contact. S’envisageant à hauteur d’homme, immersives, leurs œuvres s’ouvrent au monde bruissant ou silencieux des éléments, conviant le spectateur à une expérience totale convoquant la pensée et la vue mais également le toucher et parfois l’odorat." Texte de Sophie Bernard. Visuel > Cristina Iglesias, Chambre minérale humide, (détails) 2022 ©Adagp, Paris, 2022. Crédit Photo Estudio Cristina Iglesias.
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