Entre ce que l’on voit et son évocation, entre le mirage et la réalité, entre la lumière et l’ombre, les tableaux de la série The Crossing sont une recherche plastique puissante et une recherche poétique de ce qui lie Bao Vuong à son pays perdu. Les monochromes noirs de l'artiste sont au départ la projection du traumatisme de l’exil de sa famille, des nuits en haute mer vécues par d’innombrables boat people, la même vision que connaissent des milliers de migrants à travers les siècles et chaque jour encore. S’inspirant des terreurs et des tristesses qu’accompagnent l’exil, Bao Vuong utilise de grandes masses de peinture noire qu’il sculpte, dessine minutieusement chaque vague comme une litanie, un mantra. En nous déplaçant face aux toiles du peintre, nous vivons une expérience visuelle et introspective. Les reflets sur ces reliefs noirs nous rappellent à notre lumière intérieure, celle même qui nous guide dans les moments les plus sombres de nos vies et nous pousse à avancer. Pour cette nouvelle exposition « Horizons », il a rajouté la matière d’encens. Dans ses tableaux sous forme de cendre, l’encens figurent les nuages qui parfois cachent la lumière des astres. Dans le rituel des ancêtres - tradition encore bien présente dans tous les foyers vietnamiens - la fumée des encens est le véhicule entre les vivants et les défunts, un lien entre les hommes et l’au-delà. Sur les tableaux, la cendre d’encens est le reste palpable de cet acte sacré, la trace de nombreuses prières, la trace du souhait d’un lendemain meilleur ; mais elle est aussi la trace de ceux qui sont partis pour toujours et ne reviendront plus. Visuel > Bao Vuong, The crossing 115, 2022.
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