Laurent Proux | Line-off ceremony

Laurent Proux annonce d'emblée être préoccupé, depuis longtemps déjà, par deux régimes d'images : d'une part celles d'usines et de postes de travail, qu'il retranscrit sous forme de peintures-décors à échelle 1, lieux remplis d'évènements visuels autant qu'ils sont vides de présence humaine ; d'autre part, des peintures de corps morcelés, ensembles éclatés comme des collages, dans lesquelles se superposent différents niveaux et registres graphiques. C'est à ce second régime d'images qu'appartiennent les toiles de ce nouvel accrochage à la galerie Semiose. Un troisième régime fait aussi son apparition, images directement et prosaïquement ramenées de l'usine, où, là-bas aussi, est produit un matériel visuel et graphique à l'intention des ouvriers. Les grandes peintures récentes de l'artiste soumettent au regard des corps dé-rationnalisés, déshumanisés et assignés. Que les images-source qu'a choisies l'artiste remontent aux années 1970 - époque concomitante des lendemains encore enchantés de la révolution sexuelle et du premier choc pétrolier - n'a rien d'un hasard. Ces images-source tirées de magazines de rencontres allemands - annonces et photos auto-produites par les lecteurs -, sont appréciées par l'artiste pour leur instabilité et leur matérialité, inscrites dans l'impureté de l'image vintage. Elles sont aussi le contrecoup d'une révolution des mœurs qui n'a pas tenu ses promesses : cette révolution s'est traduite par une libéralisation sexuelle à court terme, certes, mais ne s'est pas accompagnée d'un véritable processus d'émancipation des consciences. De là s'exerce une logique industrieuse qui intrigue les corps sexualisés, les rend productifs, les transforme en marchandises.