Camille Saint-Jacques | Ce ciel comme un miroir | Exposition hors les murs

Depuis sa première exposition à la fin des années 1980, Camille Saint-Jacques a utilisé toutes les techniques et, l’on pourrait dire, tous les styles. Des peintures sur toile du début, aux tableaux de perle ou à ceux de bois en bas-relief en passant par la sérigraphie ou des pièces sonores, la pratique de cet artiste est heureusement polymorphe, invoquant généreusement des artistes du passé comme Katsushika Hokusai, Grant Wood, William Hogarth ou José Guadalupe Posada avec un refus de l’expressionnisme et de ses contentements égotiques au profit de l’utilisation de thèmes pensés comme universalistes où le langage est souvent au centre et la narration souvent présente par l’intermédiaire de personnages fictionnels emblématiques et symboliques (Mister Nobody, Moonboy, l’Imagicien…). Cette pratique artistique est prolongée par une activité théorique et militante pour modifier les conditions de diffusion et de médiatisation des œuvres d’art avec la création de revues comme Le Journal des expositions ou Post, des créations de structures d’expositions comme L’Atelier parisien ou la création de collections chez différents éditeurs comme Autrement, Max Milo ou Lienart… entreprenant de réfléchir sur l’art à partir des sciences humaines et de thématiques souvent inattendues comme le geste de l’ouvrier, le maquillage ou l’esthétique de la poussière. Depuis maintenant plus d’une dizaine d’années, si la part théorique est toujours là, les moyens plastiques se sont réduits et l’artiste a fini par se concentrer sur le dessin et la peinture sur papier dans une volonté de réduction liée à une économie de la pratique. Il s’agit de faire un travail qui ne coûte rien, demande juste un coin de pièce pour être fait et quelques euros de matériel – ce voeu de pauvreté est un refus éthique du statut traditionnel de l’artiste et Camille Saint- Jacques tient à rester en marge dans le milieu de l’art. Les dernières œuvres, quoique de grand format, sont faites sur des feuilles ajointées et l’ensemble peut aisément être replié et rangé sous un lit. Sur ces grandes feuilles, Camille Saint-Jacques peint d’abord un cadre dans la feuille laissant apparaître une marge blanche autour d’elle, c’est dans ce cadre, figure du tableau mais non tableau, que l’image va s’imposer. Des images faites à l’aquarelle, moyen pauvre, léger et somptueux que Camille Saint-Jacques utilise avec une préparation au « drawing gum » – qui est une gomme que l’on peut enlever et qui laisse en réserve la partie de la feuille qui en a été recouverte. Quant aux images elles-mêmes, elles sont simples : la flaque d’eau formée par la pluie qui s’est accumulée dans un trou formé par les jeux des enfants dans le jardin du pavillon de banlieue, le ciel et ses modulations vues par la lucarne de la petite chambre dans laquelle Camille Saint-Jacques peignait jusqu’il y a encore très peu de temps ou, parfois, quelques portraits d’amis. Camille Saint-Jacques évoque souvent, à propos de ces thématiques, l’exemple de John Constable : « Mon art limité et particulier se trouve au pied de chaque haie et dans chaque chemin de campagne, là où par conséquent, personne ne pense qu’il vaut la peine d’aller le ramasser…» Parallèlement à cette pratique picturale, Camille Saint-Jacques écrit un journal dans lequel il note ses réflexions sur l’art et les conditions de réalisation de chaque peinture. Ce journal, dont un premier volume est déjà paru, est une oeuvre en soi qui accompagne et prolonge sa pratique picturale. Ce journal est l’occasion pour l’artiste de penser et repenser la pratique artistique et ses problématiques contemporaines. Éric Suchère Les peintures de cette exposition ont été réalisée spécialement pour la Chapelle de la Visitation de Brioude. Info > Du 12 au 25 juillet, tous les jours de 10 h à 12 h et de 14 h 30 à 19 h, du 26 juillet au 19 août, du mardi au samedi de 14 h à 18 h.