Ouiouinonnon,
pour un art de proximité

C’est la fête ! ouiouinonnon est de retour à Paris. Du 24 au 27 juin, la coopérative artistique vous donne rendez-vous au 24Beaubourg, qui soutient l’initiative depuis son origine. Cette « réunion naturelle d’artistes » comme elle aime à se qualifier vous propose de découvrir et d’acheter des œuvres choisies par les créateurs eux-mêmes. Si vous craquez pour une pièce, sachez que 70 % du prix de vente, fixé par l’artiste, lui reviennent et que les 30 % restant vont à OONN pour l’organisation des événements futurs. Pour sa troisième édition, ouiouinonnon prévoit d’aménager différents espaces, plus intimes et d’y présenter notamment une sélection d’œuvres créées entre mars et juin de cette année, vendues à 300 euros. Les œuvres seront signées Martine Aballéa, Massimiliano Baldassarri, Ana Bloom, Rebecca Bournigault, Damien Cadio, Ece Clarke, Serge Comte, Julien Comte-Gaz, François Curlet, Olivier Daquin, John Deneuve, Nicolas Despis, Nicolas Gaillardon, Fabrice Hyber, Peter Klasen, Rainier Lericolais, Anthea Lubat, Olivier Masmonteil, Hugues Reip, Benjamin Reiss, Lionel Sabatté, Laurent Saksik, Sandrine Salzard, et Maxime Touratier. En attendant de les découvrir, l’initiatrice du projet Rebecca Bournigault répond aux questions d’ArtsHebdoMédias.

ArtsHebdoMédias. – Qu’est-ce qui a déclenché l’envie de OONN ?

Pour Rebecca Bournigault, l’art doit libérer la vie.

Rebecca Bournigault. – L’histoire a commencé en 2018 lorsque j’ai parlé à mon frère, Benjamin Blenck, de mon souhait de créer une coopérative d’artistes, qui serait un lieu d’expérimentations, de rencontres, de cohabitations. J’avais envie d’établir un réseau de pensées, de créer un espace d’échanges, de partage, et de circulation d’idées. Spontanément, il a adhéré au projet et m’a encouragé à le développer. Ce que nous avons fait avec Julien Comte-Gaz avec lequel j’avais déjà travaillé. La première étape a été d’écrire le manifeste. Alexandre Kourilsky nous a beaucoup aidé à épurer et mettre en forme nos idées. C’est lui aussi qui a créé notre logo et l’univers graphique de ouiouinonnon. L’énergie débordante du début de l’aventure a été nourrie par l’enthousiasme de chaque artiste que nous avons contacté. Ce qui nous a incité à la parole et à l’action !

Vous parlez de « coopérative artistique », pouvez-vous nous expliquer sur quoi est fondée cette « réunion naturelle d’artistes » ?

Nous avons proposé à des artistes de notre entourage de participer à ce projet de coopérative. Il s’agissait pour eux d’adhérer aux idées énoncées dans le manifeste et de proposer des œuvres en vue d’une exposition où elles pourraient être vendues. C’est là que la magie a opéré car la majorité des personnes sollicitées ont accueilli ouiouinonnon avec enthousiasme. Certains artistes allant jusqu’à en inviter d’autres. Chacun reste libre et la collaboration peut être ponctuelle ou suivie. Certains nous aident pour accrocher et la plupart sont présents lors des événements ce qui permet au public de les rencontrer, d’établir un lien avec eux, ce qui est essentiel pour nous. Ouiouinonnon est une expérience à rapprocher peut-être d’une AMAP (association pour le maintien d’une agriculture de proximité). Poursuivons l’analogie et disons que nous sommes pour le maintien d’un art de proximité.

Les deux premières actions de OONN ont été destinées à la vente d’œuvres. Pouvez-vous nous raconter ce que vous avez imaginé pour ces ventes ?

Nous avons fait deux événements très courts avec un vernissage et deux jours de présentation. Cette temporalité brève nous a permis de générer un moment plus intense pour mieux capter l’attention de nos invités. Les artistes ont choisi les pièces présentées et nous avons réalisé l’accrochage en étant très attentifs à mettre toutes les œuvres en valeur. J’en profite pour remercier les artistes de leur confiance et pour la qualité des pièces confiées.

Vous préparez le prochain événement OONN, comment prend-il en compte les expériences passées ?

Nous considérons ouiouinonnon #1 et #2 comme les volets d’un unique projet qui nous a permis de nous présenter. Nous essayons d’évoluer en tenant compte des retours que nous avons. Ce qui ressort principalement est un besoin et une envie de collaborer, d’échanger, de se rencontrer, et la nécessité de mettre en réseau les connaissances, créer du lien et étendre le champ de réflexion. Nous tentons donc d’élargir notre action notamment en diversifiant les formes de nos expositions.

Vue de ouiouinonnon #2, en novembre 2019, au 24Beaubourg. ©OONN

Vous avez entrepris une série d’entretiens avec différents acteurs du monde de l’art. Pourquoi ?

C’est un moyen de réaliser un portrait de notre projet à travers l’expérience de certains acteurs (artistes, galeristes, collectionneurs, critiques d’art…), et ainsi de faire circuler la parole. Cela nous renvoie aussi une image de ce que l’on propose à partir de laquelle nous pourrons interroger la suite.

Des artistes qui présentent, vendent, interviewent… Que veulent-ils exactement ? Est-ce une forme de rébellion contre un monde de l’art qu’ils jugeraient inadapté, obsolète ?

C’est une rébellion contre le monde tel qu’il est aujourd’hui, destructeur, dominateur, conflictuel, et qui accroit les inégalités. Ce monde-là a une fâcheuse tendance à entraver la vie. L’artiste, lui, dans sa pratique résiste à ce monde et s’efforce de libérer la vie, le vivant. Il ne souhaite qu’une chose continuer à créer librement.

A observer l’évolution de OONN, il semblerait qu’il ne s’agisse pas seulement de vendre. Vu de l’extérieur, OONN ressemble plutôt à une expérience. Non pas artistique comme un mouvement mais plutôt d’artistes comme une communauté ?

C’est exactement cela, une expérience, nous cherchons à provoquer de nouveaux agencements entre la présentation des œuvres et le public. Nous souhaitons que l’exposition n’use plus d’un mode passif entre l’œuvre et le spectateur. Notre proposition introduit une modalité collaborative et participative. Il n’y a pas de mot d’ordre idéologique. ouiouinonnon est une communauté de partage, qui mutualise moyens et efforts pour faire savoir. Nous tirons avantage de la coexistence de personnes d’horizons différents. Disons que tous les artistes qui participent résistent aux opinions courantes.

Comment envisagez-vous l’avenir de OONN ?

Agréger de nouveaux artistes, trouver de nouvelles formes et produire de nouveaux événements en France et à l’étranger, faire voyager les œuvres tout en étant attentifs à conserver le lien coopératif qui doit rester au centre de ouiouinonnon.

Impossible de se quitter sans vous demander comment vont les artistes de OONN en cette période inédite ?

La plupart des artistes sont inquiets mais la nécessité de faire œuvre est plus grande et ils ont répondu de manière positive à la proposition de cet événement. Comme je le disais précédemment, l’art doit libérer la vie.

Vue de ouiouinonnon #2, au 24Beaubourg, en novembre 2019. ©MLD
Contact

Ouiouinonnon #3, du 24 au 27 juin, au 24Beaubourg, Paris. ouiouinonnon FB, ouiouinonnon Instagram, site de ouiouinonnon.

Crédits photos

Image d’ouverture : Water painting, Rebecca Bournigault, vidéo présentée en novembre 2019 lors de ouiouinonnon#2. ©Rebecca Bournigault, photo MLD.

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