Disparition de Vladimir Velickovic

« Nous sommes confrontés à une situation inquiétante au niveau de la civilisation, confiait Vladimir Velickovic à Armelle Bajard, journaliste pour ArtsHebdoMédias, il y a dix ans. Au fur et à mesure que la vie passe, j’ajoute à tout ce bagage une réalité qui se reflète dans ce que je fais. C’est mon devoir d’artiste, mon devoir intellectuel, philosophique et humain de dire ce que je pense de ce monde par le biais de mes éléments et de mes symboles. J’ai survécu sans faire de compromis, et je veux continuer jusqu’au bout. » Né à Belgrade en août 1935, installé à Paris depuis le milieu des années 1960, l’artiste est décédé ce jeudi 29 août à Split, en Croatie. Peintre, dessinateur, graveur et sculpteur, il était l’un des représentants les plus importants du mouvement de la Figuration narrative et avait été élu en 2005 membre de l’Académie des beaux-arts, dans la section de peinture, au fauteuil de Bernard Buffet. Son œuvre, sombre et puissante, s’était faite inlassablement l’écho de la souffrance infligée à l’homme par l’homme – la représentation du corps était pour lui un champ d’investigation inépuisable –, de la violence dont il fut le témoin, enfant, durant la Seconde Guerre mondiale, puis lors de la dislocation de la Yougoslavie entre 1991 et 2001. « J’ai vécu ces événements très douloureusement. Ce désastre total, au cœur de l’Europe, était pour moi impensable. Tito disait : “ensemble, on est plus fort.” On partait en une sorte de front constitué de Serbes, de Croates, de Slovènes. On appelait ça la clé. Oui, je suis “yougonostalgique”. J’appartiens à ce pays-là mais il faut vivre avec cette évidence : il a été détruit ; il est trop tard pour pleurer. » Une rétrospective de son travail, qu’il préparait activement depuis deux ans, ouvrira ses portes en décembre au Fonds Hélène & Edouard Leclerc pour la Culture, installé à Landerneau dans le Finistère. Visuel : Vladimir Velickovic en 2009 dans son atelier, à Arcueil. Photo Lionel Hannoun.

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