Créée à Damas en 2006 par Khaled et Hisham Samawi, la Ayyam gallery a aidé plus d’une vingtaine d’artistes syriens à fuir leur pays, continuant par la suite de les soutenir. Aujourd’hui, l’établissement est installé à Djedda, en Arabie saoudite, à Dubaï, aux Emirats arabes unis, à Beyrouth, au Liban, et à Londres. Ces deux derniers lieux exposent actuellement le travail de Tammam Azzam, un jeune peintre ayant récemment adopté les outils numériques.
Intitulée Freedom Graffiti (2012), l’image met en scène le célèbre Baiser de Gustav Klimt, reproduit sur un mur de Damas criblé de balles et d’éclats d’obus. En février dernier, celle-ci avait fait le « buzz » sur la Toile et mis en lumière le nom de son auteur : Tammam Azzam, un peintre syrien de 32 ans, ayant fui son pays natal en septembre 2011 – sept mois après le début de la révolution –, pour éviter d’être enrôlé de force dans l’armée. Installé depuis à Dubaï, aux Emirat arabes unis, l’artiste a trouvé dans les médias numériques une forme d’expression propice à sa volonté d’engagement et de partage. Avec la série Syrian Museum, dont fait partie Freedom Graffiti, il s’approprie par exemple des chefs-d’œuvre de l’histoire de l’art qu’il associe à des scènes de dévastation photographiées à travers son pays natal, manière de juxtaposer l’extraordinaire potentiel créatif de l’humanité aux dégâts qu’elle est également capable de s’infliger. « Le Baiser de Klimt symbolise l’amour et ce qui lie les gens entre eux ; j’ai voulu tracer un parallèle avec la haine dont le régime peut faire preuve à l’encontre de son peuple », précisait-il, il y a quelques mois, au quotidien américain The New York Times. Un autre ensemble d’œuvres met l’accent sur la fragilité des structures politiques issues du conflit syrien : la série Bon Voyage (2013) dévoile des bâtiments éventrés par la guerre, emportés dans les airs par de grands bouquets de ballons multicolores et survolant des lieux emblématiques de la « conduite » du monde, eux aussi menacés de disparition : le siège des Nations unies à Genève est ainsi posé en équilibre précaire au bord d’un gouffre sans fond, tandis que les flots agités de la Tamise s’apprêtent à engloutir le Parlement de Londres. Tammam Azzam rend par ailleurs hommage au street art, qu’il considère comme un véritable outil de contestation, en adoptant à plusieurs reprises le pochoir pour tracer des signes et motifs universellement identifiables : Exit évoque l’exode de ses concitoyens, illustré par une rangée de soldats au garde-à-vous jouxtant un personnage, courbé sous le poids d’un sac, qui se dirige hors du cadre ; dans Syrian Olympic, l’artiste commente l’indécision de la communauté internationale à l’aide de symboles sportifs : les anneaux entrelacés des Jeux olympiques, ou encore des figures représentants des coureurs et des tireurs. Un travail à découvrir, à Beyrouth comme à Londres, jusqu’au 30 janvier.