Mathieu Boisadan | Pour la peau

« Mathieu Boisadan est un cannibale ; un anthropophage plus exactement. Il dévore ses victimes avec appétit, consomme ses complices avec délicatesse, goûte ses influences finement  distillées. Il n’est pas question ici de judicieuse métaphore : chez lui, l’art est question d’engagement physique, de mise en danger formelle, de morsure spirituelle. Tel Saturne dévorant ses adolescents, il absorbe leur puissance, ronge leur immortalité illusoire. Il leur redonne l’éphémère de la chair, leur promet en échange la consécration d’une peinture qui n’attend pas les ors feints et les louanges virtuoses, mais détruit les fonds et abîme les corps, ravive les chairs et réhabilite l’incarnation. Pour la peau, mais aussi pour un corps, pour la peste, pour le temps présent : des messes en forme de mouvements, induisant des rapports intimes à une peinture concentrée de références et de renvois. Un corps offert à la dégustation ; un remède esthétique ; une segmentation en neuf temps. Puis une invitation à partager un plat d’Innocence (2017), en conservant le sens, en réduisant l’éloquence. » Benjamin Bianciotto, historien de l’art. Visuel : L'innocence fragile, Mathieu Boisadan, 2018. Courtesy galerie Patricia Dorfmann.